Cliniques : plus de sobriété passe par des investissements

Dans les cliniques des groupes Elsan et Vivalto, l’heure est aux bons gestes pour maîtriser la consommation d’énergie. Mais les vraies économies passent par des investissements : isolation des plafonds et des réseaux, remplacement des chaudières et des groupes de production du froid, et début d’autoproduction d’électricité.

Groupe Froid Pôle Sante Sud Le Mans Elsan

Le comité d’investissement de Vivalto, n°3 des groupes de cliniques françaises avec 50 établissements, a accéléré, le 22 septembre, ses projets d’économies d’énergie. Au programme : plus de chaudières au gaz à condensation, de groupes froid récupérateurs de chaleur et des ombrières sur ses parkings.

Valérie Loze

Elsan, coleader en France selon les spécialités (avec Ramsay Santé qui n’a pas souhaité répondre à nos questions), a mis en place une plateforme centrale pour suivre la consommation d’énergie de ses 137 établissements. « Améliorer le pilotage de notre consommation énergétique sur le terrain est l’un des objectifs du plan de sobriété que nous déployons actuellement », explique Valérie Loze, directrice de la responsabilité sociétale du groupe.

Peu d’économies attendues de l’évolution des comportements

Dans les cliniques comme dans les hôpitaux, on cherche comment réduire les factures d’énergie de cet hiver. L’appel à la sobriété lancé par Emmanuel Maron et son gouvernement a eu son effet. Il a accéléré la prise de conscience en interne quant aux gestes du quotidien même si le personnel était déjà sensibilisé. Les cliniques de ces deux groupes s’éclairent presqu’en totalité par LED et sont habituées aux détecteurs de présence. Les ordinateurs sont plus souvent éteints qu’avant.

Groupe froid avec récupération énergétique à la Clinique Générale d’Annecy, Vivalto.

« Le secteur de la santé commence à s’emparer du sujet de l’environnement depuis peu de temps. Les réactions positives suscitées par le lancement de notre projet Green blocs montrent que les attentes sont fortes, notamment de la part des jeunes générations de soignants et de praticiens ; c’est encourageant », avoue Valérie Loze. Hervé Goinvic directeur technique et immobilier de Vivalto, de son côté, relativise : « l’évolution des comportements nous apportera 2 %, 3 % d’économies au maximum ».

5 millions en plus sur la facture

Hervé Goinvic

Les récentes hausses de prix ont eu l’effet d’un électrochoc. Pour Vivalto, près de 5 millions d’€ de plus sur la facture de 2022 par rapport aux 16 millions d’€ de 2021. Les deux groupes affichent un certain réalisme. « L’activité de soins est indispensable. En ce sens, elle sera toujours consommatrice d’énergie. Mais l’amélioration de la performance énergétique du secteur est indispensable », analyse Valérie Loze. « Même une fois passé ce mauvais moment, l’énergie va nous coûter au moins deux à trois fois plus cher de façon définitive. C’est ce que nous dit le cabinet conseil qui nous accompagne sur ces questions. Or nous ne sommes pas maîtres de nos recettes », renchérit Hervé Goinvic.

Réduits de nuits dans les blocs

Elsan et Vivalto ne veulent pas, néanmoins, négliger l’action au quotidien. Récemment, ils ont instauré des « réduits de nuits » dans les blocs opératoires. La nuit et les week-ends, ne plus faire tourner qu’à petite vitesse, grâce à des systèmes de programmation des moteurs, les centrales de traitement d’air des blocs qui fournissent c’est selon, le chaud ou le froid, voilà qui apporte de grandes économies. Chez Vivalto, cette optimisation, ajoutée à la régulation générale des températures, génère 10 % d’économie dans chaque clinique rachetée.

Mais pour vraiment économiser, le travail de fond, à coup d’investissements, paie davantage. « Nous sommes en train de définir la trajectoire de notre stratégie carbone, en lien avec les Accords de Paris sur le climat. L’énergie est le poste direct le plus émissif : le plan de sobriété et les actions menées dans le cadre du décret tertiaire devraient avoir un impact sur nos futurs bilans carbone », signale Valérie Loze. La rénovation immobilière s’accélère. Comme le remplacement des installations pour une plus grande performance énergétique. « Nos constructions neuves ont labellisées HQE ce qui garantit leur performance énergétique dans la durée », note-t-elle.

Modernisation des chaudières

Chaudières à condensation de la clinique Pasteur à Evreux (Vivalto)

Chez Vivalto, 3 millions d’€ par an depuis 2019 ont servi aux éclairages LED, à isoler les plafonds, les planchers de bâtiments parfois très anciens (le plus vieux à Evreux date de 1899), à changer les menuiseries, isoler les réseaux d’eau chaude, remplacer les chaudières. 30 ont été remplacées. Il y en a quatre en cours actuellement. La moyenne d’âge des chaudières a baissé de 25 à 15 ans. Quinze groupes de production de froid ont été changés (40 % de ceux existants) deux sont en cours de remplacement, il y en aura six autres cet hiver.

Remplacement de la production d’eau glacée du Pôle Santé Sud au Mans (Elsan) : la chaleur générée par la génération du froid est redistribuée au niveau de la production d’eau chaude sanitaire et le préchauffage des centrales de traitement d’air.

Depuis quatre ans, Vivalto a baissé de 20 % sa consommation d’énergie. Pendant les huit premiers mois de l’année 2022, il a encore diminué de 8 % sur le gaz et de 3 % sur l’électricité, malgré la canicule de cet été. « Les IRM, les scanners, tout le matériel médical pousse à augmenter notre consommation. Mais jusqu’ici, malgré des augmentations régulières de tarifs, nous avions réussi à compenser et maintenir nos charges », indique Hervé Goinvic. D’ici 2023, Elsan espère diminuer sa consommation de 10 % en 2023. Pour la réduire encore, il faudra investir pendant des années. Par exemple dans les pompes à chaleur. « Qui représentent clairement l’avenir » pour Hervé Goinvic.

Bien vu par les actionnaires

Autre orientation, Vivalto se tourne vers la production de son électricité. Il installe des ombrières photovoltaïques sur ses places de parking. Les premières ont été inaugurées à la clinique Mathilde de Rouen. D’autres projets concernent huit cliniques du groupe. Ces investissements ne seront amortis qu’à long terme. Ce qui fait, pour le moment, un peu hésiter Elsan. « Nous espérons produire 20 à 25 % de l’électricité dont nous avons besoin, explique Hervé Goinvic. C’est le genre d’opérations grâce auxquelles les fonds d’investissement actionnaires présents chez nous affichent leur action en faveur du développement durable. Cela compte aussi. »

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