Du stock aux blocs en 1 minute 40

À Lausanne, la logistique du Centre hospitalier universitaire vaudois continue sa marche en avant industrielle. Une nouvelle étape vient d’être franchie avec la mise en service d’un nouveau robot de stockage qui est capable, en à peine 1 minute 40, de livrer dans les blocs opératoires le matériel stérile dont les médecins peuvent avoir besoin en cours d’intervention pour les urgences. Une première mondiale.

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À peine plus d’une minute et demie est nécessaire au nouveau robot du CHUV de Lausanne pour aller piocher l’une des 5 000 références disposées dans le nouvel espace de stockage aménagé sous les blocs opératoires et les livrer en urgence aux chirurgiens en pleine intervention, si besoin en est. Une telle performance technologique n’existe nulle part ailleurs tant les innovations sont multiples : stocker autant de références en atmosphère stérile en est une. Utiliser un transstockeur capable d’effectuer tout à la fois des translations horizontales et verticales en est une autre, tout comme son installation miroir, et livrer pratiquement en temps réel les références dont les chirurgiens peuvent avoir besoin pour les urgences en est encore une autre !

Les urgences, mais pas seulement

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Une prouesse technologique que nous présente Pierre-Yves Müller, le directeur du département de la logistique hospitalière à la tête d’une équipe de 1 200 agents. « Une réflexion a été conduite afin de libérer de l’espace au sein des blocs opératoires qui ont été rénovés, explique-t-il, le meilleur moyen était de stocker ailleurs le matériel médical, un constat partagé par les soignants et la logistique ». En à peine deux semaines les équipes de la logistique hospitalière trouvent la solution. Reste à la mettre en œuvre, ce qui d’autant plus compliqué qu’il faut pouvoir répondre à l’urgence, garantir l’approvisionnement en temps réel, reconstituer les stocks, toujours en temps réel, et le tout en ambiance stérile. Une équation qui semble impossible à résoudre sans intervention humaine.

Une équation impossible à résoudre ? Pourtant, celui qui était ingénieur en mécanique industrielle avant d’entrer au CHUV y est arrivé. Et la réponse à cette équation est une première mondiale. Si l’on met de côté le cas des urgences, traité instantanément, la procédure s’appuie sur le planning opératoire transmis la veille à la logistique. « Le kit d’instruments est préparé la veille pour chaque intervention », poursuit Pierre-Yves Müller.

Borne de commande

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« Chaque article est scanné afin d’assurer la traçabilité et la gestion des stocks, le matériel sort automatiquement selon l’ordre de priorité des interventions et il est éventuellement complété par l’instrumentiste », détaille le directeur. Dans le cas des urgences, le matériel est directement commandé sur une borne de commande installée dans le bloc. Et seulement 1 mn 40 après, les instruments sont entre les mains des chirurgiens. Cela va si vite que la borne de commande a déjà son petit nom : “Borne McDo”, en référence aux burgers de la chaîne de restauration rapide américaine.

« L’enjeu est trop important, explique-t-il, aussi nous avons conçu notre dispositif sur le principe du miroir ; la chaîne logistique est doublée, les deux allées de stockage étant indépendantes, ce qui fait que si l’une d’entre elles venait à tomber en panne, l’autre prendrait immédiatement le relais ». C’est ainsi que pour limiter les risques une paroi coupe-feu a été installée. Autant dire que le CHUV, classé parmi les meilleurs hôpitaux du monde par le magazine Newsweek pousse la barre très haut.

Translations horizontales et verticales

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Stockés dans un entrepôt traditionnel, les dispositifs et les consommables médicaux ainsi que les instruments arrivent dans un sas intermédiaire où ils sont décartonnés avant d’être stérilisés et orientés par le transstockeur vers l’espace de stockage stérile. Le réapprovisionnement du consommable médical courant est effectué tous les jours, selon les besoins. Les plateaux d’instrumentation sont mis en stock au fil de l’eau après retraitement à la centrale de stérilisation. Les articles qui doivent être placés dans le transstockeur sont définis avec les soignants.

Avec un tel cahier des charges, l’appel d’offres n’était pas gagné d’avance, d’autant qu’après sourcing, aucun fabricant au monde n’était capable de fournir un tel transstockeur. Dans un environnement stérile, avec de fortes contraintes d’hygiène et de sécurisation du stock, ce robot hors normes est capable d’assurer tout à la fois des translations horizontales et verticales, le magasin n’étant pas au même niveau que les blocs.

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Et c’est un fabricant suisse, qui a été capable de concevoir cet inédit mouton logistique à cinq pattes. Près de trois millions d’euros ont été investis par le CHUV pour l’ensemble de l’installation, y compris pour la création de la zone de stockage pressurisée à l’image d’une zone stérile. La Suisse montre là un bel exemple de coopération entre soignants et logisticiens. Un exemple unique au monde. Alors, à qui le tour ?

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