CHU de Montpellier : de l’IA avec le décret Noël

En signant une convention de partenariat de recherche qui va déboucher sur ses deux premiers achats innovants, le CHU de Montpellier est rentré dans le cercle très fermé des établissements qui profitent des opportunités offertes par « le décret de Noël » du 24 décembre 2018. Directrice des achats et des approvisionnements, Florence Marques nous explique comment son CHU a su profiter des dispositions ce texte expérimental pour acquérir deux solutions d’intelligence artificielle appliquée d’aide au diagnostic.

© Gabrielle Voinot/CHU Montpellier

« Le décret de Noël, ce n’est pourtant pas un cadeau ! ». La formule est lapidaire mais elle résume assez bien la situation. Directrice des achats et des approvisionnements du CHU de Montpellier, Florence Marques pointe vite les limites du dispositif mis en place par le décret du 24 décembre 2018 : « Un montant maximum de 100 000 € HT, c’est bien peu quand on raisonne à l’échelle d’un établissement tel que le nôtre ». Bien peu également à l’échelle d’un GHT.

La marge de manœuvre offerte par le décret de Noël pour les achats innovants est limitée en termes de montant, c’est donc sans doute ce qui explique le peu d’engouement pour le texte jusqu’à présent. Il y a en réalité une autre raison que le montant maigrelet fixé par le décret du 24 décembre 2018, mais elle n’inquiète pas Florence Marques outre mesure : « Si l’on ne suit pas scrupuleusement la procédure au pied de la lettre, passer de gré à gré un marché de 100 000 € comme l’autorise le décret de Noël n’est en effet pas sans risque, dit-elle, mais ici, à Montpellier, tous nos marchés, tous nos avenants, sont passés au crible par nos juristes ». Pas moins d’un millier d’actes contrôlés chaque année…

 

L’IA au service du diagnostic en radiologie conventionnelle et traumatologique

Rappeler qu’un achat innovant doit impérativement être innovant n’est pas si superfétatoire que ça, car c’est de là que peuvent surgir les contentieux. « Une déclaration à l’Observatoire économique de la commande publique est obligatoire pour chacun des marchés innovants passés, rappelle Florence Marques, mais c’est bien avant qu’il convient de verrouiller la procédure ».

C’est ce ont fait ses équipes pour les deux solutions d’intelligence artificielle appliquée d’aide au diagnostic que recherchait les investigateurs de projets de recherche soutenu par la direction de la recherche et de l’innovation du CHU : « C’est bien parce qu’il nous faut démontrer qu’un achat est innovant que nous devons absolument réaliser un sourcing approfondi, explique la directrice des achats et des approvisionnements, si le produit n’existe pas sur le marché il n’y a logiquement pas de mise en concurrence à réaliser et on peut envisager de contractualiser de gré à gré ».

Du benchmark pour se border

Ce qui n’empêche pas de faire du benchmark pour se border au maximum afin d’éviter les embûches. En effet, s’il devait y avoir contentieux, le juge doit pouvoir disposer de tous les éléments qui lui permettront de s’assurer qu’il s’agit bien d’une innovation. Aussi, le CHU de Montpellier a cadré ces achats à l’appui d’une convention de partenariat de recherche : « Il s’agit d’un contrat qui stipule clairement les apports mutuels de l’industriel et des équipes du CHU autour du projet de recherche », détaille Florence Marques.

Florence Marques © G.Voinot/CHU Montpellier

« Dans le cadre de ce partenariat le CHU fournit des data issus de notre PACS – Picture Archiving and Communication System, système d’archivage et de transmission d’image – images anonymisées de toute donnée personnelle patient, pour tester la solution d’une startup française spécialisée dans les solutions d’intelligence artificielle d’aide au diagnostic. Elle met à disposition des équipes médicales plusieurs applications cliniques d’IA unifiées sur une plateforme coud sécurisée qui permet ensuite de co-créer des algorithmes et applications d’IA sur mesure avec les centres médicaux sur des thématiques cliniques ciblées. Si la recherche menée dans les hôpitaux français permet d’entériner le fait que l’IA est efficace, les logiciels de ce type envahiront le marché de la santé dans le futur ».

 

Un décret adapté aux marchés de niche

Pour la directrice des achats et des approvisionnements du CHU de Montpellier et du GHT de l’Est Hérault et Sud Aveyron, l’achat innovant, tel qu’encadré actuellement par le décret de Noël, ne peut être qu’un achat de niche : « Comme nous l’avons vu, les montants autorisés par le décret de Noël ne sont pas assez importants, alors dans ce cas précis, le cadre de la convention de partenariat est particulièrement adapté ».

Et de poursuivre : « À mon niveau, je ne fais que traduire dans un achat réglementé le travail de co-conception mené entre l’investigateur du projet de recherche, la direction de la recherche et de l’innovation du CHU et l’industriel ». « À l’issue du partenariat de recherche prévu sur 6 mois, les résultats de l’étude seront rendus et analysés. Rien n’empêche que dans un futur plus ou moins proche nous achetions en mode SaaS (Software as a Service, fourniture d’applications par abonnement sur un modèle cloud computing) les deux logiciels testés ! » conclut Florence Marques.

Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *