Au CHU de Nantes, un directeur des achats venu du privé

Clément Parmentier arrive de grands groupes du CAC 40. Il va adapter les méthodes d’achats de l’industrie – agilité, négociation – au CHU de Nantes. Avec l’ambition de faire évoluer les bases de lancement des appels d’offres et le suivi des contrats.

Au sortir de son école d’ingénieurs, l’École nationale supérieure d’arts et métiers (ENSAM), les achats avaient été pour lui une « révélation ». Quinze ans de métier plus tard, passés chez Cartier, Bouygues et Nexity, Clément Parmentier est, depuis mars, le nouveau directeur des achats du CHU de Nantes et du GHT 44. Prêt pour sa reconversion dans le public et le démarrage d’une nouvelle vie.

A 40 ans, Clément Parmentier conjure en effet, à Nantes, le regret de ne pas avoir embrassé la carrière de médecin. Il en compte beaucoup parmi ses amis. Par ailleurs, lui, l’enfant des Ardennes, fils de salariés de la Caisse d’allocations familiales, élevé avec le sens du dévouement à la collectivité, retrouve à Nantes « du sens à son métier ». Dans les entreprises du CAC 40, il a vu le travail de l’acheteur voué exclusivement, encore plus depuis la crise du Covid, à l’augmentation de la rémunération des actionnaires. Cette fois, il œuvrera indirectement pour le bien de patients.

Chasser la sur-qualité inutile

La direction du CHU voulait diversifier les profils du service achats. C’est pourquoi elle l’a choisi sans qu’il ait fait l’EHESP. « Je dois apporter plus de performance au service achats, comme je sais le faire. Mais je ne suis pas un cost-killer. Faire des économies, oui. Apporter plus de service pour le même prix, oui. Mais aussi viser le juste besoin, chasser la sur-qualité inutile. Répondre le mieux possible, en somme, au besoin de l’hôpital et de ses patients », explique-t-il.

Il a une quarantaine de personnes dans son service, 70 au total avec les acheteurs des autres directions du CHU et d’autres établissements du GHT. Il veut les libérer de tâches administratives. Mettre à jour des bases de données peut, par exemple, être confié à des assistants acheteurs. D’ici quelque mois, il restructurera.

Impeccable en amont

Clément Parmentier gère pour le moment ses acheteurs par des « challenges au quotidien ». Ses équipes y trouvent une nouvelle motivation. Il veut varier leurs « plaisirs ». Il n’y a pas que les procédures dans le métier d’acheteur. Il y a aussi le travail en amont.

« C’est primordial ! D’autant plus que le contexte juridique de la commande publique est plus contraignant. Dans le privé, on peut reprendre un appel d’offres, changer plein de choses au fur et à mesure. Dans le public, après l’avoir publié, on en récolte les fruits sans guère pouvoir intervenir. On est un peu bloqué. On ne peut pas négocier ou très peu. Il faut donc être impeccable en amont. »

En matière d’appels d’offres, Clément Parmentier veut améliorer le sourcing, se montrer plus « sexy », plus attractif pour attirer plus de candidats, accroître ainsi la concurrence, allotir de manière intelligente et monter, finalement, des appels d’offres plus performants.

Les bons leviers dans l’environnement concurrentiel

Sa préoccupation centrale est de bien positionner le CHU dans son environnement concurrentiel sur chacun de ses marchés. Il se réfère au modèle pour l’industrie des cinq forces de Porter (le pouvoir de négociation des clients, celui des fournisseurs, la menace des produits de substitution, celle d’entrants potentiels sur le marché et l’intensité de la rivalité entre les concurrents, dont l’analyse permet d’identifier les facteurs clés de succès).

« Qui sont les acteurs sur le marché, les autres acheteurs, les fournisseurs ? Qu’est-ce que je représente pour eux ? Maîtriser ces leviers amène à une consultation plus intelligente. Il est peut-être plus intéressant de représenter 15 ou 20 % du chiffre d’affaires d’un fournisseur local, avec la perspective de devenir un de ses clients prioritaires que de représenter 0,05 % du chiffre d’affaires d’une multinationale. Dans ces temps de difficultés d’approvisionnements, cela peut devenir crucial. Mais cette analyse globale des marchés demande un travail considérable », synthétise le directeur des achats.

Marchés plus morcelés

Il veut aussi renforcer le versant aval, le suivi des fournisseurs. « A partir de marchés plus morcelés », annonce-t-il. Objectif, rester assez agile pour introduire de nouveaux acteurs en chemin, profiter des innovations. Cette souplesse s’impose quand la conjoncture des signatures de contrats à des prix élevés qu’il faudra faire baisser par la suite. « Au prix d’un gros travail de suivi », détaille-t-il.

Autre chantier, Clément Parmentier veut introduire de la négociation dans ses marchés, même s’ils sont publics. « Dès qu’elle est possible, qu’elle soit menée ! Je veux faire monter en compétences mes équipes sur le sujet. Cela demande de la pratique. »
Cartographie de la criticité des marchés

Dans un avenir plus lointain, le nouveau directeur des achats du CHU ambitionne d’écrire une matrice de tous ses achats. Etablir une « cartographie de la criticité » des marchés en fonction de leur valeur stratégique et du positionnement concurrentiel du CHU sur chacun d’eux. La construction pour 2027 du futur CHU de Nantes devrait en profiter.

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