Achats inclusifs : la politique volontariste d’Enedis

Entreprise publique responsable de la gestion et de la maintenance du réseau de distribution d’électricité, Enedis a engagé ses achats dans une démarche résolument socialement responsable, avec un objectif de 10 millions d’euros annuels attribués au secteur du handicap, y compris pour ses activités coeur de métier, comme la cartographie numérique de ses implantations.

© Epictura

Dix millions. Voilà le volume annuel d’achats en direction du secteur du handicap sur lequel s’engage Enedis, chargé de gérer et d’entretenir le réseau de distribution d’électricité français. Son directeur des achats, Bertrand Pouilloux, à la tête d’une équipe de 160 personnes, l’a annoncé lors d’Inclusiv’Day le 3 juin dernier.

Détentrice du label « Relations fournisseurs et achats responsables », l’entreprise publique n’hésite pas, depuis longtemps, à confier des prestations aux entreprises adaptées et établissements et services d’aide par le travail (ESAT). Cela fait maintenant plus de 10 ans que le lavage des vêtements et des équipements individuels est quasiment intégralement réalisé par le secteur du handicap.

Du nettoyage des vêtements à la cartographie numérique des réseaux

Disséminée jusque-là en centaines de petits contrats locaux, la prestation de blanchisserie et de nettoyage à sec a été regroupée au sein d’une seule consultation nationale (au bénéfice d’environ 12 000 porteurs répartis sur 552 sites), publiée au mois de mai. Mais si Enedis a choisi de mutualiser ces achats, la structure a aussi décidé de continuer à réserver l’appel d’offres aux EA et ESAT.

Les contrats attribués sortent aussi des sentiers battus. 60 % des marchés de recyclage des anciens compteurs électriques remplacés par la génération Linky ont ainsi bénéficié à des entreprises du secteur du handicap. Autre achat « cœur de métier » très responsable : la cartographie numérique des réseaux.

Rien n’est impossible

Au fil du temps, le secteur du handicap s’est intéressé à ce segment de niche particulier, où interviennent peu d’entreprises et encore moins de donneurs d’ordres. Aujourd’hui, deux structures sont capables de répondre globalement aux besoins d’Enedis, au même titre que des prestataires conventionnels. Tout n’a pas été forcément simple. Et il a fallu accompagner les entreprises pour les faire monter en compétence.

Cependant « rien n’est impossible », a témoigné François Le Devehat, acheteur expert du segment cartographie chez Enedis, « il faut retirer les œillères et se débarrasser des caricatures. » Résultat : le montant des achats pour le sujet est passé de moins de 100 000 euros il y a trois ans, à un million d’euros, a chiffré Bertrand Pouilloux.

Alignement des planètes

Comment parvenir à convaincre une organisation, acheteurs, prescripteurs et utilisateurs, d’accepter de contractualiser avec une EA ou un ESAT ? Bertrand Pouilloux a insisté sur la cohérence de la démarche et sur la gouvernance qui joue pour beaucoup. En 2020, lors de l’arrivée de Marianne Laigneau à la présidence du directoire de l’entreprise, un nouveau projet industriel et humain a été structuré autour de plusieurs axes, dont l’un était de « favoriser la RSE dans nos activités dans les territoires ». Et l’impact positif de la politique RSE déclinée dans trois dimensions : pour la planète, pour les femmes et hommes (bien-être pour les salariés et les prestataires, inclusion sociale) et pour les relations avec les territoires (desserte de l’énergie).

« Le dernier acte, c’est la signature d’un accord handicap, avec un engagement sur un objectif de 10 millions d’achats au secteur adapté et protégé », a poursuivi Bertrand Pouilloux qui a reconnu que c’était à la fois peu (Enedis achète en moyenne pour 4 milliards par an, NDR) et beaucoup. « Cet alignement tête de l’entreprise/direction des achats/accord handicap rebondit sur les métiers, parce qu’il fait sens. Aujourd’hui, quand on dit aux directions métiers qu’on va adresser un lot au secteur du handicap, elles ne sont pas surprises. »

Reste à savoir quelle procédure privilégier pour acheter socialement responsable. Bertrand Pouilloux estime qu’il faut savoir jouer du lot réservé à bon escient. Car cette technique peut aussi se révéler un piège pour des EA et ESAT capables de candidater et d’emporter une grande partie ou l’intégralité des lots d’un appel d’offres standard. C’est pourquoi il a fait le vœu, à terme, que l’achat inclusif se standardise, sans forcément passer par la différenciation.

 

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