SAD : la bonne pioche du GHT 44

Limiter la flambée des prix des produits à usage unique et sécuriser les approvisionnements. Le tout pour 29 établissements, hôpitaux et EHPAD de la région Pays de Loire. Le GHT 44 a trouvé la solution à ces multiples défis avec un système d’acquisition dynamique. La formule, récompensée par un Trophée Santé Achat, a permis d’élargir considérablement le panel de candidats et de dégager des gains substantiels.

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Comment à la fois retrouver des tarifs antérieurs à la crise Covid pour les fournitures à usage unique et sécuriser les approvisionnements dans les années à venir ? Le tout avec un dispositif suffisamment réactif en cas de besoin, et souple pour convenir aux 29 établissements rassemblés au sein d’un groupement régional ? Après réflexion, ni l’appel d’offres classique, trop rigide, ni l’accord-cadre, qui ne permet pas d’ouvrir la concurrence en cours de procédure, ne cochent toutes les cases.

Démystifier le SAD

Plutôt que d’inventer une martingale, le GHT Loire-Atlantique choisit la solution du système d’acquisition dynamique (SAD). Une procédure peu prisée des acheteurs. Et toujours peu usitée. Tout au plus une quinzaine de publiés sur le BOAMP en 2021. « Je pense effectivement qu’il faut démystifier le SAD parce que ce n’est pas si compliqué que cela », assure Stephanie Rochereau, acheteuse du GHT 44. « C’est plus une méconnaissance et la peur de l’inconnu » confirme sa collègue conseillère juridique Élisa Hohl.

Pour mettre toutes les cartes de son côté, le GHT soigne son ingénierie contractuelle. Et le binôme précité est épaulé par le cabinet d’avocats Rayssac. « L’essentiel du travail a porté sur la rédaction du CCATP du SAD », signale Élisa Hohl. La définition des catégories apparaît aussi comme une étape essentielle et délicate. « Il faut bien placer le curseur : précis mais pas trop, pour ne pas s’enfermer, éviter que le marché spécifique ne vienne contredire le cahier des charges du SAD. Il faut aussi anticiper au maximum les différents cas de figure pour ne pas être bloqué », poursuit la juriste.

Plus souple qu’un accord-cadre

Cinq domaines correspondant aux familles de produits à usage unique sont finalement retenus : articles divers (articles en plastiques, en carton, et en matière absorbante) ; essuyage ; literie et habillement ; masques ; protection tête, pied et mains. « Lors de la publication du SAD, nous avons donné des listes correspondant aux libellés de catégories en précisant qu’elles n’étaient pas exhaustives et qu’elles seraient amenées à évoluer dans le temps en fonction des relances ou des nouveaux besoins… », précise Stephanie Rochereau.

L’acheteuse illustre son propos. « Dans la catégorie protection, on va ajouter des couvre-chaussures avec semelles antidérapantes, besoin non exprimé au départ ». D’autant que l’acheteur a la faculté de lancer un marché spécifique pour tout ou partie du domaine. Un système évidemment bien plus souple qu’en appel d’offres classique. Mais ce n’est pas le seul avantage du SAD.

« Dans le secteur de l’usage unique, les fluctuations des prix sont importantes. En cas de tension, un établissement peut se retrouver en grande difficulté avec trois entreprises retenues dans un accord-cadre, et toutes en rupture de stocks. L’acheteur dispose d’un vivier de sociétés qu’il peut solliciter avec une remise d’offres au bout de 10 jours seulement », met en lumière Me Mathieu Didier, avocat du cabinet Rayssac.

Moyens de production localisés dans l’Union européenne

De gauche à droite : lors de la remise du Trophée Santé Achat, Me Mathieu Didier et la délégation du GHT 44 : Stephanie Rochereau, Antoine Wallaert et Elisa Hohl.

« Dans le cas du GHT, les marchés sont reconductibles tous les 4 mois. Si, au bout de ce délai, il y a défaillance ou explosion des prix, il peut remettre en concurrence. De quoi éviter des avenants ou la mise en œuvre des clauses de révision des prix. C’est un outil bien adapté à une situation compliquée. L’imprévision ne permet pas non plus de faire tout et n’importe quoi », poursuit l’avocat dont le cabinet a aidé à mettre au point une boîte à outils, avec une série de trames utilisables lors du lancement des marchés spécifiques : lettre de consultation, courrier de rejet, acte d’engagement….

Dans le but de sécuriser les sources d’approvisionnement, le GHT décide d’actionner l’article L 2112-4 du Code de la commande publique qui impose que les moyens de production soient localisés sur le territoire des Etats membres de l’Union Européenne. « La clause n’a été activée que pour les masques et concerne la conception et la fabrication », insiste Stephanie Rochereau.

Les entreprises jouent le jeu

Mis en ligne en janvier 2021, le SAD, d’une durée de 8 ans, est suivi d’une première salve de marchés spécifiques mono-attributaires par catégorie au printemps. C’est une bonne pioche. Côté juridique, rien à signaler, ni problème majeur, ni contentieux. Côté concurrence, le panel soumissionnaires a bénéficié d’un coup de jeune. Une quarantaine de candidatures rien que pour les masques.

Grâce à une communication ad hoc, les entreprises ont très bien réagi à la nouvelle règle du jeu. « Nous réexpliquons à chaque fois comment fonctionne le SAD. Les fournisseurs lui font bon accueil. Ils n’ont plus besoin de faire de veille des journaux d’annonces légales puisque c’est la plateforme qui les alerte du lancement du marché spécifique », détaille Stephanie Rochereau. « Le SAD ne nous bloque pas comme avec un accord-cadre multi-attributaire avec des situations obsolètes entre la 1e et la 4e année. Ici le panel fournisseurs est mis à jour en temps réel, aussi bien en termes de qualité que de quantités », complète Élisa Hohl.

500 000 euros de gains pour le groupement régional

La concurrence entretenue a fourni des résultats. Après une première baisse en juin 2021, le GHT a bénéficié encore de prix moindres sur certains produits en octobre. Au total, les gains annuels, calculés à partir des derniers prix d’achat connus, se montent à 500 000 € pour le groupement régional. Une nouvelle vague de marchés spécifiques est prévue en février, dans quatre catégories.

Le bilan concluant devrait donner envie de capitaliser cette expérience et de lancer des SAD dans d’autres domaines. « On pourrait l’étudier pour notre groupement régional de produits d’entretien. C’est typiquement le genre de marchés où il y a toujours des évolutions », songe Stephanie Rochereau.  Ses collègues acheteurs, Caroline Deniaud et Freddy Chevrier, envisagent à leur tour d’utiliser cette procédure dans le domaine alimentaire pour la souplesse qu’elle propose en termes de produits.

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