Neurologie : un dialogue très compétitif pour le CHU Amiens Picardie

Le CHU d’Amiens a été inspiré en lançant un dialogue compétitif pour son service neurochirugie. La démarche a permis à la fois d’acquérir des techniques dernier cri et d’imaginer un modèle financier compatible avec la capacité budgétaire de l’établissement et les intérêts du fournisseur. L’opération a été l’occasion de démontrer concrètement la valeur ajoutée de la fonction achat et son rôle dans la transformation du système de prise en charge du patient.

© Medtronic

Tout commence avec une demande d’un IRM per-opératoire de la neurochirurgie du CHU d’Amiens. Déjà pôle d’excellence avec plusieurs « premières » mondiales à son palmarès et la participation au développement du robot ROSA®, le service du Pr Johann Peltier voulait faire encore mieux et développer les techniques de chirurgie mini-invasives. Mais côté finances, ni l’achat, ni la location ne sont jugées possibles ou pertinentes. Plutôt que de jeter l’éponge, la direction des achats, dont la philosophie est de proposer des solutions innovantes adaptées aux besoins du terrain, lance un dialogue compétitif fin 2016, avec l’espoir d’imaginer un mécanisme de convergence des intérêts entre l’établissement et le fournisseur potentiel. A partir de l’été suivant, la société Medtronic, la direction de l’ingénierie biomédicale pilotée par Alexandre Jaborska, l’équipe de neurochirurgie du Pr Michel Lefranc, la pharmacie et les achats planchent sur le sujet pendant sept mois.

Nouveau modèle économique

Magali Tassery

Résultat : un contrat de 6 ans (budget de 6 millions) en coût complet comprenant les équipements, le renouvellement des matériels du bloc opératoire, l’imagerie, les prestations associées (intégration, interfaçage au SI, formation et maintenance), l’accompagnement pour optimiser le fonctionnement et le parcours patient. L’innovation achat : un nouveau modèle économique, basé sur un paiement à la procédure et un intéressement corrélé à la hausse d’activité. « On a obtenu du matériel qui n’existe quasiment pas en France », se félicite Magali Tassery, directrice des achats du GHT.  Bonus, l’insertion judicieuse d’une clause de réexamen dans le dialogue compétitif a permis d’acquérir un appareil Visualase (ablation par laser sous contrôle IRM) qui n’était pas encore commercialisé durant la procédure.  Installé en avril 2018, le dispositif a généré deux « premières » en France et en Europe : l’excision guidée par IRM d’une tumeur cérébrale de plus de 2,5 cm de diamètre sans ouverture de la boîte crânienne (décembre de la même année) et le traitement de douleurs cancéreuses morphino-résistantes (janvier 2019). Et les opportunités médiales ultérieures sont nombreuses.

Baisse de la durée moyenne de séjour

Conçu globalement, le chantier s’est accompagné d’une remise à plat des étapes de prise en charge du patient de l’amont de l’intervention jusqu’au retour au domicile, en lien avec les médecins traitants et les différents acteurs (prise de rendez-vous en ligne, recours à l’application de la start-up Maela pour la préparation et le suivi post-opératoire). Périple au long cours, l’opération fait l’objet d’un suivi particulier avec une revue fournisseur trimestrielle et une douzaine d’indicateurs (durée moyenne de séjour (DMS) par thérapie, taux d’ambulatoire, taux de réhospitalisation, nombre de séjours, taux d’utilisation des équipements, nombre d’adresseurs, part de marchés régionale par thérapie…). Les bénéfices de l’opération sont tangibles : « La DMS a chuté. En neurochirurgie légère, les patients arrivent le matin et repartent l’après-midi. Nous sommes devenus plus compétitifs que le secteur privé », assure Magali Tassery. L’effet boule de neige joue à plein. Le matériel est utilisé pour diverses pathologies, comme l’épilepsie.

Et la démarche a séduit d’autres disciplines à l’image de l’orthopédie qui sont venues frapper à la porte de la direction des achats. Une bonne nouvelle : « Cela crédibilise la fonction et cela offre des opportunités à l’établissement  », admet Magali Tassery. Véritable vitrine, l’initiative a servi l’image de marque du CHU et du GHT, grâce à la communication associée (conférences internationales, articles dans les revues scientifiques, exposés dans les écoles d’ingénierie biomédicale…). La directrice des achats tire les leçons de cette démarche pas comme les autres : « Il faut faire confiance au terrain et accepter de sortir des sentiers battus, tisser des relations avec les fournisseurs qui ont des bonnes idées et toujours avoir pour cible de répondre concrètement aux enjeux des utilisateurs ».

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