Gestion de crise : de la supply chain à la réa

Avant même que la crise ne soit passée par là, l’Institut Mutualiste Montsouris ne voyait déjà plus les achats comme le dernier maillon de la chaine, mais au contraire comme l’un des éléments d’une seule et même chaine de production. Au sein de l’établissement de santé privé d’intérêt collectif parisien, Hervé Péray, à la tête de la direction achats et supply chain, et Christian Lamer, chef du service réanimation, ont vu tomber les barrières entre soignants et services support.

© IMM

La deuxième vague ? « Nous nous sommes organisés pour faire face au risque, explique Hervé Péray, elle ne serait en fait que la continuité de la première… ». Il ne faut pas croire que le directeur des achats et de la supply chain de l’Institut Mutualiste Montsouris (volume d’achats de 70 millions d’euros hors travaux) prenne les choses à la légère, loin de là, mais, pour lui, il va bien falloir vivre avec les incertitudes : « Une deuxième vague ne serait pas seulement sanitaire, si elle se confirme, elle sera également sociale, économique… ». Il le voit bien en consultant ses tableaux de bord, le redémarrage industriel n’est pas net, bien loin de là : « Là où nous avions des délais de six semaines sur certains produits, il faut en compter douze aujourd’hui ».

 

Hervé Péray

Pour Hervé Péray, à la tête d’une équipe de 90 personnes (achat et logistique) on n’en est plus à savoir si les acheteurs seront capables d’anticiper : « Il faut que nous mettions nos organisations en capacité de réagir, à notre niveau également on ne fera plus jamais comme avant, c’est fini, c’est un peu comme avec l’arrivée des génériques, il a bien fallu apprendre à faire avec ». Selon lui, parler simplement d’achat est réducteur : « La fonction a évolué, il ne s’agit plus simplement d’acheter ou de réaliser des gains, une “supply chain” doit nous permettre d’intervenir en amont et en aval de l’acte d’achat, et c’est ce que nous faisons ici. À Montsouris nous sommes “out of the box“… ».

 

Tous solidaires

 

Pour Hervé Péray, qu’elle soit qualitative ou quantitative, la définition du besoin se fait en collaboration avec les soignants, en amont : « Nos modes de travail ont changé, relève-t-il, et plus encore avec l’apparition du Covid, nous avons appris à mieux travailler ensemble, des barrières sont tombées ». Ainsi, en aval, c’est également avec les soignants qu’il travaille pour définir par exemple la bonne utilisation des achats : « Il suffit de prendre l’exemple des équipements de protection individuelle pour constater qu’une bonne définition des usages permet d’affiner les quantités à commander ».

 

L’équipe du magasin

Parce que, pour lui, se pose également la question du stockage : « Faire du stock ? Stocker quoi ? Pour deux mois ? Pour trois mois ? Ce n’est pas faisable, dit-il, tout ne passe pas par le stock ! Les protocoles et les techniques de prise en charge ont changé, la folie serait de faire aujourd’hui la même chose qu’avant en attendant des résultats différents. Il faut être réactifs, décloisonner et échanger, ainsi, nous pourrons nous adapter ».

 

C’est bien ce qui s’est passé à l’Institut Mutualiste Montsouris : « Dès le début de la crise — et c’est cette fois-ci Christian Lamer, le chef du service réanimation, qui s’en félicite — une réunion quotidienne était organisée par la direction générale avec tous les praticiens, la pharmacie, l’encadrement et les services supports, dont les achats. Nous échangions les informations, évoquions nos besoins, les approvisionnements ; une nouvelle forme de solidarité s’est créée au sein de l’institution en réunissant chaque jour les équipes médicales et les services support ».

 

Partager les connaissances

 

Le service réanimation

Cette nouvelle forme de travail collaborative, cette collégialité, aussi bien Hervé Péray que Christian Lamer veulent la voir perdurer, d’autant que, dans chacun de leurs services, aux achats comme en réa, les équipes se sont soudées durant la crise. Cette solidarité s’est également manifestée entre les différents hôpitaux, qu’ils soient privés ou publics. Quand Hervé Péray échangeait avec d’autres acheteurs, Christian Lamer en faisait autant avec d’autres réanimateurs au sein d’un groupe WhatsApp : « Monté à l’initiative d’Alain Cariou, réanimateur médical dans le service médecine intensive et réanimation à Cochin, ce petit groupe réunissait quotidiennement une dizaine de réanimateurs du sud parisien, confie Christian Lamer, bien plus que de simples échanges scientifiques, nous échangions sur les techniques de ventilation, les difficultés d’approvisionnement, l’activité dans chacun de nos services… ».

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