Définition des besoins : la méthode de deux métropoles

Accompagnement des prescripteurs ou protocole hyper-cadré pour ajuster au plus près le besoin ? Les deux écoles existent et parfois même cohabitent. Mais selon l’expérience des métropoles d’Aix-Marseille et de Brest, plus tôt les acheteurs interviennent, plus des gains auront des chances d’être réalisés. C’est pourquoi les deux structures s’appuient sur la programmation.

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« Le juste prix, c’est le juste besoin ! ». En quelques mots, Christophe Hannequin résume l’équation à résoudre. Mais pour lapidaire qu’elle soit, la formule du directeur de la programmation et de la performance achat à la métropole Aix Marseille Provence repose sur un schéma très encadré. Très encadré et pris très en amont : « Si le cahier des charges est déjà rédigé ce sera trop tard pour nous, explique-t-il, nous ne pourrons effectuer des gains qu’à la marge, alors que si nous pouvons intervenir dès l’expression du besoin en accompagnant le service prescripteur, nous pouvons déjà orienter une solution ».

Ne pas tomber dans le panneau

Christophe Hannequin

Et de prendre un exemple significatif bien que prosaïque avec les panneaux de signalisation : « Le service souhaitait commander des panneaux dont les bords soient recourbés vers l’arrière afin de ne pas être tranchants. Mais en rédigeant un cahier des charges avec ce critère, on excluait automatiquement les fournisseurs de panneaux dont les bords ne sont pas tranchants sans pour autant être recourbés, et l’on s’interdisait donc la possibilité de réduire les coûts en limitant la concurrence ».

À l’autre bout de la France, Romain Tournereau, responsable du service coordination de l’achat à Brest Métropole reprend également le cas de figure des panneaux : « Mettre en œuvre un sourçage avec l’organisation de rencontres de plusieurs fournisseurs nous a permis d’éviter la sur-qualité et de stimuler grandement la concurrence, explique-t-il, nous avons ainsi réalisé sur ce marché un gain de l’ordre de 20 % ».

Mettre fin à la tentation du “copier-coller”

Accompagner les services prescripteurs très tôt est aussi le moyen d’éviter le “copier-coller” relativement fréquent pour les marchés récurrents : « L’anticipation est la clé, dit Romain Tournereau, car challenger le besoin nécessite un temps suffisant ». C’est aussi notamment pour cette raison que Christophe Hannequin s’appuie sur la programmation.

Avec elle, difficile de passer à travers les mailles du filet : « Notre base est alimentée par trois sources différentes, explique-t-il, tout d’abord nous effectuons chaque année en juin une campagne de recensement en direction des services pour détecter les marchés sur lesquels nous devons intervenir, ensuite nous identifions entre 18 et 24 mois à l’avance les marchés récurrents, et enfin nous analysons les remontées des acheteurs qui disposent chacun d’un portefeuille et peuvent ainsi détecter les besoins en gestation dans les services qu’ils couvrent, nous permettant d’intervenir très en amont ».

Romain Tournereau

À Brest, Romain Tournereau est lui aussi partisan d’une activation de la démarche d’optimisation très en amont de la publication de la consultation : « Pour les marchés faisant l’objet d’une démarche d’optimisation, nous réalisons avec les services un véritable état des lieux, dit-il, tout d’abord en dressant le bilan du marché en cours, puis en définissant les objectifs de la démarche d’optimisation (gains économiques, sociaux, environnementaux…), puis à la définition du besoin avant de passer au benchmark, au sourcage, au bilan du sourcage, pour permettre in fine la détermination de la stratégie d’achat ». Challenger les achats avec les services passe chez lui aussi par la programmation pluriannuelle : « Cela fait plusieurs années qu’elle est en œuvre ici, et pour les marchés récurrents nous nous déployons dès la fin de l’année précédant le renouvellement ».

L’acheteur doit connaître l’état de l’art

Pour Romain Tournereau, les processus préparatoires à la détermination de la stratégie d’achat que sont la définition des besoins, le parangonnage et le sourçage sont aussi indispensables qu’interdépendants : « Mais attention, si le sourçage contribue à la définition des besoins, il ne s’y substitue pas ».

Fort des enseignements de cette phase préparatoire, l’acheteur “éclairé” peut ainsi déterminer la stratégie d’achat et le montage contractuel adéquat : « Période de lancement, procédure, allotissement, variantes, critères, durée et délais, clauses de développement durable, pénalités, révision de prix, la liste n’est pas exhaustive ». Et pour lui, tout comme pour Franck Guyot à l’AP-HM (notre article du 23 novembre 2020), la méthode QQOCOQP est un outil précieux pour l’analyse et la définition du besoin.

À la métropole Aix Marseille Provence, Christophe Hannequin sait que la clé de la réussite passe par un accompagnement de tous les instants : « L’acheteur, sans prétendre égaler la connaissance technique des services prescripteurs dont c’est le cœur de métier, doit parfaitement connaître l’état de l’art et l’environnement fournisseur de son portefeuille, et ne pas hésiter à accompagner les prescripteurs sur des salons professionnels, ou à en suggérer la visite : cela fait partie de sa mission “famille” ».

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