Biomédical : un bâtiment neuf, c’est le Saint-Graal ?

Les ingénieurs biomédicaux sont pratiquement toujours confrontés au manque de place. Le biomédical est pourtant un maillon indispensable de la chaîne de soins. Alors un établissement neuf, est-ce le Saint-Graal ? À Neuilly-sur-Seine, nous avons poussé les portes de la nouvelle clinique du groupe hospitalier privé Ambroise Paré-Hartmann et rencontré Pascale Prost, directrice générale du groupe, Tony Le Bras, responsable du service biomédical, et Pierre Squara, le directeur médical. Tous ont travaillé sur la nouvelle clinique, appelée ici le « 48 ter ».

© Guillaume Loyer

achat-logistique.info : Le Saint-Graal, vraiment ? Installer du matériel neuf dans un bâtiment neuf, est-ce vraiment plus simple ?

Pascale Prost : « Oui, sans l’ombre d’un doute. Mais uniquement lorsque les responsables du service biomédical sont partie prenante dès la phase de réflexion, lorsqu’ils sont associés à une équipe pluridisciplinaire. Pour nous, le défi était énorme, car le nouveau bâtiment du groupe hospitalier privé Ambroise Paré-Hartmann ouvert début septembre s’étend sur 35 000 m2.

Lorsque le groupe Hexagone a décidé de construire une nouvelle clinique avec l’ambition d’en faire la première clinique privée d’Île-de-France, la pluridisciplinarité a été érigée en principe. Le responsable du service biomédical faisait donc partie de l’équipe qui se réunissait chaque semaine afin d’échanger sur l’évolution du projet et croiser les besoins des uns et des autres. »

achat-logistique.info : Quel est le sentiment de l’ingénieur biomédical à ce sujet ? Est-ce réellement plus facile ?

Tony Le Bras : « Oui, mais sous certaines conditions. Nous devions anticiper le flux de travail réel avec différentes théories de fonctionnement, les nouveaux équipements qui au 48 ter sont particulièrement nombreux : nouvelles salles de blocs hybrides chirurgie et imagerie, deux salles de chirurgie robotique, cinq salles d’endoscopie diagnostique et interventionnelle, stérilisation centrale automatisée dotée de sept autoclaves et huit laveurs, en chimiothérapie des isolateurs dépressurisés dotés de caméras de contrôle pour sécuriser au maximum le process de reconstitution des médicaments anticancéreux injectables, 32 salles de bloc opératoire, du vidéo management dans les blocs…

© Guillaume Loyer

Autant dire que nous devions tous suivre une logique d’efficacité de travail. Toutes ces réflexions devaient être conduites d’après les plans d’implantation du maximum d’équipements pour s’assurer d’un résultat qui correspond à nos attentes. C’est pour cela que nous devions être proactifs pour organiser la livraison et l’installation des nouveaux appareils.

Ensuite, il nous fallait identifier et prioriser les services, faire la différence entre ce qui était urgent et ce qui était important et urgent… Une fois que nous avions défini les services les plus techniques, les plus compliqués à déménager, nous avons installé la plupart du temps du matériel neuf en prenant en compte les parcours patients, les équipements, et leurs implantations. Donc pour équiper un bâtiment neuf avec du matériel neuf, il faut avoir une très bonne préparation. Tout ça c’est avant tout un travail d’anticipation. »

achat-logistique.info : Pour équiper un nouvel établissement, pensez-vous qu’il faille réutiliser le matériel qui existait dans l’ancien bâtiment ou préférer systématiquement du neuf ?

Pierre Squara © N.Courau-Roudier

Pierre Squara : « Il faut s’interroger sur le matériel avec lequel on travaille aujourd’hui et ce qui sera nécessaire à plus ou moins brève échéance, anticiper. Est-il nécessaire de déménager aujourd’hui un matériel dont on sait qu’il sera bientôt en fin de cycle, ou est-ce que l’on doit partir sur un renouvellement, même s’il est anticipé ? Ce sont les questions que se posent tous les responsables biomédicaux avec leurs directions confrontés à cette situation.

Faut-il déménager un parc dont on sait qu’il est vieillissant, même s’il fonctionne encore parfaitement ? Faut-il le réformer ? Et faut-il systématiquement déménager du matériel très récent au moment où on lance le projet, mais qui ne le sera plus cinq ans après ? Comment s’organiser ? Personnellement, je n’ai pas été confronté à ces problématiques car j’ai travaillé sur ce dossier durant plus de cinq ans. Donc il y a cinq ans je pouvais déjà savoir quel matériel devrait être remplacé et lequel pourrait être déménagé, et dans quelles conditions.

Mais sur un espace-temps de cinq ans tout peut changer. Une fois encore, cela passe par une nécessaire anticipation, un dialogue avec la direction générale et les services de soins, d’autant qu’il faut pouvoir former tous les soignants à l’utilisation des nouveaux appareils. Nous sommes interdépendants. »

achat-logistique.info : Pour le matériel neuf, avez-vous privilégié l’achat ou la location ?

Pascale Prost © G.Loyer

Pascale Prost : « Ce sont des choix qui doivent bien sûr se décider très tôt afin d’établir les prévisionnels, anticiper les délais de livraison et d’installation. Mais le Covid est venu tout bousculer et ne nous a pas aidé pour respecter les délais et les budgets ! Il nous a fallu commencer à signer les bons de commande deux ans avant l’ouverture à cause des délais de livraison devenus beaucoup plus longs tout en respectant le chiffrage prévisionnel.

Avec ces impondérables, alors que tout le monde était ici sur le pont à cause de la pandémie, il fallait tout reprendre et vérifier que l’inventaire que nous avions réalisé soit exhaustif. Arbitrer entre ce qu’on allait acheter, ce que l’on gardait et ce qu’on allait alors louer avec une option d’achat. En ce qui concerne la maintenance, nous en assurons une bonne partie mais certains équipements tels que les IRM et les scanners sont assurés par les constructeurs eux-mêmes. »

achat-logistique.info : Les ateliers techniques du biomédical sont souvent à la portion congrue, comment vous êtes-vous organisés au 48 ter ?

© Guillaume Loyer

Tony Le Bras : « Dans les plans initiaux, tout avait été anticipé, mais à cause du Covid, notamment, il y a eu des retards dans les travaux, donc il a bien fallu arbitrer entre les services qui étaient prioritaires et ceux qui l’étaient un peu moins. J’ai donc fait le choix de ne pas être équipé tout de suite d’un atelier au 48 ter, d’autant que nous en avons un, avec notre bureau, à la clinique Ambroise Paré au 25-27 boulevard Victor Hugo, à deux pas.

Mais son rapatriement au 48 ter est bien prévu pour le principal, même si nous garderons un atelier également boulevard Victor Hugo. Pendant longtemps, l’activité biomédicale n’était pas un service structuré. La reconnaissance est venue de notre compétence pour garantir la sécurité des patients et des matériels médicaux dans les établissements. Le biomédical est maintenant une partie intégrante reconnue de tous les services dans tous les centres hospitaliers. »

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