La logistique au centre du jeu

Quoi de mieux qu’un « serious game » pour inciter acheteurs, logisticiens et financiers, aux préoccupations différentes, à mieux collaborer et à ne plus travailler en silo ? Au cours des parties de ce jeu baptisé Wood stock, des équipes de plusieurs hôpitaux doivent apprendre à maîtriser leurs stocks et trouver la meilleure solution, en fonction des scenarii qui leur sont proposés.

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Une seule chaîne qui réunit acheteurs, logisticiens et financiers avec la logistique comme maillon central ? C’est le raisonnement poursuivi pour l’ANFH par CDAF Formation (organisme adhérent au Conseil national des achats) avec Wood stock, l’un des jeux pédagogiques qu’elle édite dans le cadre de ses formations diplômantes. « En fin de cursus, ce jeu vient souligner l’impact qu’ont les décisions d’achat sur la logistique, explique Ronan Hascoët, directeur pédagogique de l’organisme de formation, on ne peut pas décorréler ces deux fonctions support ».

Apprendre à collaborer

Ni non plus les finances, associées aux décisions prises en amont. « Le jeu est générateur d’émotions positives, favorables à l’acte d’apprendre, poursuit-il, il est un axe pédagogique majeur car il permet d’ancrer les acquis, mettre en pratique, amener à la réflexion et apprendre à collaborer ». Effectivement, selon lui, achats, logistique et finances ne peuvent fonctionner que si elles sortent de leurs silos : « D’où le fonctionnement par équipes de trois, rassemblant chacun de ces métiers ».

Les équipes de plusieurs hôpitaux s’affrontent afin de résoudre différentes situations qui leur sont soumises par l’animateur. À chaque situation la solution sera différente, et elle forcera acheteurs, logisticiens et financiers à travailler de concert. Et l’on peut analyser les choses de deux façons : soit les logisticiens sont au centre de l’action, soit ils se retrouvent coincés entre des directions des achats et celles des finances. Comme dans la vraie vie ?

Décloisonner les fonctions soutien

Bernard d’Ortho

« Au départ, acheteurs, logisticiens et responsables des finances ont des préoccupations différentes, constate Bernard d’Ortho, l’expert en achats publics qui anime les formations, l’acheteur cherche la solution la moins chère, le logisticien ne veut pas risquer les ruptures d’approvisionnement mais, dans le même temps, le financier qui ne souhaite pas immobiliser sa trésorerie lui demande de maîtriser ses flux en gérant ses stocks au plus bas ».

Le jeu sert à décloisonner et sensibiliser les joueurs aux contraintes des autres. Et c’est là que la logistique joue un rôle pivot : « Les circuits doivent être les plus courts possible ». La position centrale de la logistique est soulignée par le directeur pédagogique de l’organisme de formation : « Quel que soit le type de situation auquel sont confrontées les équipes, les logisticiens doivent jongler avec les stocks, explique Ronan Hascoët, et c’est pour cela que les équipes doivent prendre des décisions en commun en tenant compte de la réalité économique de leur établissement hospitalier ».

Prendre des décisions de manière collégiale

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C’est là qu’intervient Bernard d’Ortho qui redistribue régulièrement les cartes en confrontant les joueurs à des situations qui peuvent changer du tout au tout : « Les événements seront différents, mais les décisions devront toujours être prises collégialement ». Et, pour compléter, il évoque l’algorithme qui va lui permettre, alors que la bonne stratégie avait été finalisée par une équipe, de modifier l’un des paramètres (flux de patients, épidémie, salles d’opérations indisponibles, etc.) qui les obligera à tout modifier en temps réel afin que Bernard d’Ortho puisse tester la réactivité et la solidité de l’équipe face au stress. Grâce à son algorithme, il a bien évidemment la solution. Mais pas les équipes… C’est du sérieux comme ce devrait l’être dans la vraie vie. Même si, dans la vraie vie, justement, ce n’est pas gagné…

C’est du sérieux, oui, mais il ne faut pas oublier le côté ludique de ce support pédagogique. Et c’est pour le souligner que Ronan Hascoët a choisi une maladie, la “melonite” : « Lorsqu’un patient atteint de “melonite” arrive à l’hôpital, il faut tout d’abord assurer le dégonflage de la tête, poser ensuite une rustine, et enfin injecter de l’air ». Les équipes doivent acheter trois dispositifs médicaux différents pour chacune de ces étapes : « Au centre du jeu, les logisticiens doivent gérer les flux, les approvisionnements et optimiser les stocks ».

Variation des paramètres

C’est d’autant moins simple quand les situations varient au dernier moment : « Pour chaque hypothèse, les équipes pluridisciplinaires doivent trouver les meilleures réponses ».  Et du côté des joueurs, ça se passe comment ? Pharmacienne acheteur responsable du secteur médicaments de l’AP-HM, Manon Roche est maître de conférences des universités et praticien hospitalier. Elle a découvert le jeu dans le cadre d’une formation ANFH d’acheteur leader : « Très ludique, la version hospitalière de Wood stock permet d’avoir une vision globale sur le fonctionnement de l’hôpital, ce qui change de notre approche généralement cloisonnée, dit-elle, et le fait de partager avec des personnes venant d’un autre hôpital et d’un autre secteur est également très intéressant ».

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