Hôtels hospitaliers : l’option externalisation

Patientèle extraterritoriale, seniors isolés, soins de suite ou pratiques ambulatoires… Si l’hôtel hospitalier s’impose comme un dispositif à portée de tous les besoins, l’est-il aussi à tous les moyens ? Pour nombre d’établissements, la contractualisation s’avère la rime la plus accordée à sécurisation. Voici le volet 2 de notre enquête sur les hôtels hospitaliers.

Hôtel Madrigal-Necker ©Hotel Madrigal

Solution complète qui optimise le bien-être des patients autant que l’organisation des établissements, l’hôtel hospitalier n’en est pas moins un investissement qui exige d’être sûr de son « coût » au regard du volume de séjours évalués. Or, tout comme pour le choix des patientèles ciblées (lire notre article du 11 novembre 2022) cet engagement peut emprunter des voies différentes, en fonction de l’établissement, de son territoire et de la stratégie poursuivie…

« Parce que la gestion hôtelière est un vrai métier », selon Olivier Bonaventur, directeur du Centre mutualiste de Kerpape et « parce qu’elle permet de se jouer des variations d’activité en transférant le risque sur un tiers », complète le directeur des opérations à l’AP-HP Necker-Enfants malades, Benjamin Lemoine, l’externalisation s’impose comme l’option la plus fréquente.

Un 3ème hôtel partenaire en 2025

Yaël Gliksman

Le principe en est simple : « pré-bloquer un quota de chambres dans un hôtel existant sur la base d’un contrat dont le cahier des charges cadre les prestations : tarif de la nuitée quel que soit le contexte (congés, JO…), repas, accueil des accompagnants… », explique Yaël Gliksman, responsable achat, logistique et hôtellerie hospitalière au centre Gustave Roussy. Depuis les années quatre-vingt, cet institut de lutte contre le cancer conventionne ainsi avec un hôtel Campanile situé à 400 mètres, rejoint depuis par un second lieu et bientôt un troisième, projeté pour 2025. « Au total, 21 chambres, sont actuellement réservées à l’année au prix négocié de 89 euros, soit un reste à charge de 9 euros assumé par le Centre au regard du forfait réservé à ce dispositif par l’assurance maladie », détaille la responsable.

S’y ajoutent les frais des chambres non utilisées, dues à moitié tarif pour un taux de vacance compris entre 5 % et 10 %, et ceux d’un système de voiturettes instauré entre les sites hôteliers et le Centre afin de faciliter la mobilité des patients (50 000 euros/an). Total du dispositif : « entre 25 000 euros et 35 000 euros en moyenne, mais dont le retour se confond avec l’attractivité et le déploiement du Centre depuis quarante ans », pose Yaël Gliksman, qui conseille cependant : « attention aux conventions trop longues ; mieux vaut investir chaque année le temps de travail d’un acheteur que supporter des clauses devenues inappropriées. »

Parier sur la saisonnalité

Tout aussi convaincu de la pertinence de l’hôtel hospitalier pour ses patients dont la rééducation s’étale sur plusieurs semaines, le centre de Kerpape, basé à Ploemeur, réfléchit de son côté à la meilleure optimisation possible en profitant de la saisonnalité de cette commune littorale morbihannaise : « fondée sur des réservations en basse saison, cette formule gagnant-gagnant nous garantirait des tarifs privilégiés tout en permettant aux hôteliers d’absorber leurs coûts », détaille Olivier Bonventur.

D’autres enfin ont également choisi de conventionner avec l’extérieur mais « en restant très attentifs aux valeurs partagées », spécifie Nathalie Vidal, responsable de la démarche qualité et coordinatrice du parcours patient au CHU de Limoges jusqu’à fin août 2022. Hôtel mutualiste ici, structure associative aux tarifs alignés sur les revenus (de 23 à 49 euros) au CHU de Reims…

Une ambition commune

Benjamin Lemoine ©DR

À Necker-Enfants malades qui travaille avec l’hôtel Madrigal, Benjamin Lemoine exprime l’ambition commune : « travailler avec de véritables partenaires de soins qui priorisent les besoins de l’hôpital et dont les personnels ont été formés aux différentes pathologies des patients accueillis. » Pour ce site de l’AP-HP qui affiche une moyenne de 60 nuits mensuelles, soit trois chambres et demie dont une réservée à l’année aux urgences maternité, le budget alloué tourne autour de 3 000 euros de dépenses supplémentaires par mois, auxquelles s’ajoute l’équipement de l’hôtel en matériels de puériculture (baignoires adaptées, chaises hautes, etc.).

« Certes, entre lits libérés ou chambres in fine inexploitées pour cause de complications inattendues, les recettes sont particulièrement complexes à évaluer », reconnaît le directeur hospitalier. Pour autant garantit-il, « au regard de la fluidité et de l’activité générées, les dépenses, principalement constituées d’un reste à charge de 39 euros entièrement assumé par l’hôpital auquel s’ajoute parfois le coût majoré d’une chambre hors convention, sont incontestablement compensées. » Ou comment réussir à ajouter de la valeur aux valeurs.

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