Biologie : quand les prélèvements prennent le métro

Opération unique en France, un raccordement pneumatique, installé via les lignes du métro de Marseille, transporte, depuis novembre dernier, beaucoup plus rapidement les 8 000 prélèvements quotidiens entre l’Hôpital de la Conception, l’ensemble des unités de La Timone et le Biogénopôle. Quelques minutes suffisent pour les acheminer du lit du patient au plateau technique.

 

© AP-HM

Le professeur Bruno Lacarelle est formel : « À ma connaissance, l’utilisation du métro est une première, souligne le chef du pôle biologie de l’AP-HM, à Lyon un pneumatique entre deux hôpitaux existe mais il a été créé de toutes pièces en creusant une galerie ». Si nous étions en Angleterre, le titre de cet article aurait été facile à trouver : « Des tubes dans le Tube » puisque “The Tube” est le sobriquet dont les Londoniens ont affublé leur métro.

Un raccordement unique en France

© B.Lacarelle

« Le réseau de pneumatiques qui vient d’être mis en service permet d’acheminer dans les tuyaux le fruit des prélèvements, déclare-t-on à l’AP-HM, et particularité locale, ce réseau emprunte le tunnel du métro entre les stations Baille et La Timone, une manière d’optimiser l’existant à moindres frais ». Une idée originale qui se concrétise enfin moyennant un investissement de 4,5 millions d’euros.

Cette innovation a été développée par la société marseillaise SNEF dans le cadre du projet Biogénopôle. Porté depuis une dizaine d’années par le professeur Bruno Lacarelle, ce projet est en cours de réalisation à l’hôpital de La Timone. Il comprend notamment la mise en œuvre d’un Plateau Technique à Réponse Rapide (PTRR) automatisé pour centraliser l’ensemble des prélèvements.

Délais ultra-rapides

Aujourd’hui, la dispersion des activités entre les différents sites des Hôpitaux universitaires de Marseille (quatre sites avec une quinzaine de localisations dans différents bâtiments) entraîne des difficultés logistiques ainsi qu’une perte de temps dans l’enregistrement et le traitement des demandes, une dispersion qui rend impossible la mutualisation des équipements coûteux. Grâce au raccordement pneumatique installé via les lignes du métro de la cité phocéenne, les 8 000 prélèvements quotidiens vont être plus rapidement acheminés entre l’Hôpital de la Conception, l’ensemble des unités de La Timone et le Biogénopôle.

Alors qu’il fallait entre trente minutes et trois heures, le nouveau système automatisé va permettre de transmettre un prélèvement dans une cartouche, en quelques minutes, depuis le lit du patient jusqu’au plateau technique. « Une réelle optimisation des délais améliorant la qualité de vie au travail, se félicite-t-on à l’AP-HM, ainsi, les personnels qui s’occupaient de l’acheminement des prélèvements vont pouvoir être redéployés sur d’autres missions, notamment au service des patients ».

7 000 m2 de locaux entièrement rénovés à La Timone

Le réseau pneumatique s’appuiera donc sur celui du métro et sera doté d’un process de triage presque entièrement automatisé. Près de 8 000 prélèvements par jour sont analysés par le pôle biologie de l’AP-HM. Auparavant les échantillons étaient acheminés par des coursiers, ou encore par les personnels des unités de soins eux-mêmes.

Le projet BioGénoPôle des Hôpitaux universitaires de Marseille a été conçu dans un objectif d’amélioration de l’ensemble de ces domaines d’activité, tant au niveau de l’efficacité que de la qualité de vie au travail. Il a obtenu un soutien financier du Comité interministériel de performance et de la modernisation de l’offre de soins (Copermo) à hauteur de 23 millions d’euros, soit la moitié du coût du projet total.

« Le projet BioGénoPôle va permettre de regrouper les différents services de biologie dans 7 000 m2 de locaux entièrement rénovés à La Timone, se félicite le professeur Lacarelle, cela inclut le PTRR et de nombreuses plateformes spécialisées : biologie moléculaire, biochimie spécialisée, séquençage à haut débit, cytométrie en flux, hématologie spécialisée, immunologie, spectrométrie de masse… ».

Libérer du temps pour le personnel

Bruno_Lacarelle ©AP-HM

Pour celui qui porte ce projet depuis des années, la robotisation ne remplace en aucun cas l’humain : « Elle est au contraire à son service, plaide-t-il, les résultats des examens urgents, par exemple, pourront être rendus dans des délais optimisés sans que les équipes aient à fournir de travail supplémentaire. Elles seront au contraire exonérées de certaines tâches purement organisationnelles. L’automatisation des tâches les plus simples fournit l’opportunité de se consacrer davantage aux domaines les plus complexes et innovants ».

Et pour illustrer son propos, Bruno Lacarelle prend l’exemple d’une situation à laquelle les soignants sont confrontés tous les jours : « À La Conception, si un prélèvement est effectué au 6ème étage, il fallait le plus souvent qu’une aide-soignante descende jusqu’au 1er étage avant que des coursiers le transportent ensuite à La Timone ! Avec le pneumatique, il est à La Timone en moins de cinq minutes… ».

 

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