Variantes : comment éviter le contentieux

Les variantes, parfois opportunes pour les acheteurs car elles peuvent permettent la présentation de solutions innovantes avec des gains financiers à la clef, peuvent s’avérer également être des sources de difficultés ou de contentieux. Une CAA vient ainsi récemment de juger de la régularité de la variante et de sa notation. Avocate au cabinet Rayssac, Me Fanny Augier revient sur les principaux points de vigilance.

Solution différente de celle envisagée par l’acheteur, la variante permet au candidat de remettre une offre différente, qu’elle soit moins chère ou techniquement supérieure. Elle correspond à des « modifications, à l’initiative des candidats, de spécifications prévues dans la solution de base décrite dans les documents de la consultation » (CE, 5 janvier 2011, n° 343206, Société Technologie Alpine Sécurité/Commune de Bonneval-sur-Arc).

Cette utilité pour l’acheteur a une contrepartie : celle d’être particulièrement vigilant sur l’usage de la variante lors de la passation de son marché. Le principe en procédure formalisée est l’interdiction, sauf mention contraire du pouvoir adjudicateur aux documents du marché. A l’inverse, pour les MAPA, le principe est l’autorisation des variantes, sauf mention contraire du pouvoir adjudicateur.

L’acheteur doit également veiller à préciser, dans le RC, si la variante s’accompagne d’une offre de base. En effet, depuis le décret n° 2011-1000 du 25 août 2011, les candidats peuvent présenter les variantes seules. Autrement dit, l’obligation de constituer un complément de l’offre de base a été supprimée. Une attention particulière devra également être portée sur le nombre maximal de variantes autorisées.

Le respect des exigences minimales

Autre obligation rappelée par une récente décision de la Cour administrative d’appel de Marseille (13 décembre 2021, n°17MA04927-20MA01956) : les variantes doivent respecter les exigences minimales ainsi que leur modalité de présentation fixées au dossier de consultation (article R.2151-10 du Code de la commande publique). A défaut, le juge administratif pourra considérer qu’il s’agit d’une violation des obligations de publicité et de mise en concurrence, à supposer toutefois que le candidat évincé puisse démontrer une lésion. Ce dernier point pouvant également prêter à discussion selon que l’offre retenue est une offre de base ou une variante (CE, 3 décembre 2014, n°384180). Ces éléments d’analyse relèvent de l’appréciation de la recevabilité de l’offre, c’est-à-dire avant son analyse qualitative à proprement parler.

L’analyse de la jurisprudence montre la sévérité des juridictions sur ce sujet. Le juge considère ainsi que la définition d’exigence minimale des variantes n’est pas respectée lorsqu’un règlement de consultation se contente d’exiger des variantes qu’elles «  indiquent clairement leur objet et leur intérêt économique et technique » (CAA Lyon, 11 oct. 2012, n° 11LY01982, SAS Faurie) ou encore de mentionner seulement la faculté, s’agissant d’un marché de prestations de tri de déchets, et sans autre précision, de formuler des offres variantes « avec des filières complémentaires » de recyclage (TA Grenoble, 9 mars 2009, n° 0900714, Sté Ortec Environnement).

Dans l’arrêt de la CAA de Marseille précité, les magistrats rappellent également que la variante doit être accompagnée d’une offre de base conforme, bien que sur ce point le moyen manquait en fait et ait été rejeté. En effet, à défaut d’offre de base conforme, la variante proposée par l’attributaire n’aurait pu être retenue par le pouvoir adjudicateur.

Comment analyser les variantes ?

Me Fanny Augier

Pour choisir l’offre économiquement, l’acheteur doit veiller à ce que les critères d’attribution retenus puissent être appliqués tant aux variantes qu’aux offres de base R. 2152-7 du code de la commande publique. Dans la pratique, nous constatons que deux méthodes principales peuvent coexister. L’une consiste à analyser et classer toutes les offres (base et variantes) selon un même et unique classement.

La seconde méthode s’effectue en 2 temps. Dans un premier temps, deux classements séparés peuvent être établis, l’un pour les offres de base, l’autre pour les variantes. Dans un second temps, l’offre de base classée première est comparée avec l’offre variante classée première et la meilleure des deux offres est classée première sur le classement général.

Cette méthode qui a pu être proposée par la doctrine n’emporte pour autant pas notre préférence, car un débat peut exister sur la façon de départager ces 2 offres (base et variante) placées en 1ère position. En d’autres termes, le choix, qui ne peut évidemment être discrétionnaire, pourrait être faussé pour le critère financier, selon la méthode de notation utilisée, et il conviendra de s’assurer que l’offre retenue représente bien l’offre économiquement la plus avantageuse des 2 restant en lice.

L’objet d’une présentation complète

Au-delà de l’approche juridique, l’analyse technique et financière est parfois complexe à mener. L’acheteur devra en effet veiller à s’assurer de la pertinence des critères techniques pour l’analyse des variantes. Ainsi qu’il vient de l’être souligné supra, l’analyse financière peut également différer selon, d’une part, la méthode de comparaison choisie pour les variantes et, d’autre part, la méthode de notation utilisée pour le critère du prix.

Enfin pour rappel, l’acheteur doit également bien veiller à ce que les variantes ne diffèrent pas de l’offre de base (CE, 28 juillet 1999, Institut français de recherche scientifique pour le développement en coopération et la société Océa, n°188051 et n°188219 et articles R. 2151-10 et R. 2351-9 du code de la commande publique).

En effet, dans le cadre d’un contentieux, le juge administratif examinera si l’offre variante retenue était rendue comparable aux offres de bases reçues (CAA Bordeaux, 20 mars 2018, n°15BX01913). A cet égard, il peut être opportun de conseiller aux acheteurs de rappeler dans le DCE que l’offre variante doit faire l’objet d’une présentation complète, et qu’elle soit, en outre, complétée par un cahier des écarts permettant de valoriser la variante par rapport à l’offre de base.

 

 

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