Chaque membre d’un groupement doit pouvoir attester de ses capacités

Bien que l’appréciation de l’aptitude d’un groupement d’entreprise soit globale, un acheteur peut exiger de chaque membre qu’il apporte la preuve de ses capacités professionnelles, à l’image d’attestations de certification. Tel est le sens d’une très récente décision de la Cour de cassation.

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En mai 2018, EDF lance un marché pour des prestations de déménagements en métropole. Groupement momentané de 54 entreprises réparties sur tout le territoire, une société répond à l’appel d’offres, mais voit sa candidature rejetée. L’entité adjudicatrice a en effet demandé, dans son DCE, que chaque entreprise fournisse la preuve de certifications Iso 14001 (respect de l’environnement) et 9001 (organisation) afin de s’assurer d’une qualité de service homogène. Malgré une demande de régularisation, seules 48 des 54 sociétés transmettent les documents précités.

Appréciation globale et capacité de chaque entreprise

Le soumissionnaire déclenche alors un contentieux auprès du juge des référés du Tribunal de grande instance de Paris. Se fondant sur l’article 44-V du décret du 25 mars 2016 alors en vigueur (aujourd’hui article R 2142-25 du Code de la commande publique), il argue que l’acheteur devait apprécier globalement la qualité de la candidature et que la durée supplémentaire – une semaine – était insuffisante pour récolter l’ensemble des attestations. Le magistrat accède à sa requête en juillet.

Antoine Alonso

Selon Me Antoine Alonso (cabinet Alma Avocats), cette solution revenait à dire, dans les faits, que l’un ou plusieurs prestataires pouvaient intervenir par exemple sans avoir souscrit une assurance ad hoc, ce qui pose problème car l’on recherchera la responsabilité du donneur d’ordre, si au cours du transport ou du transfert, le prestataire provoque un accident.

Multiplication des sociétés « coquilles vides »

L’acheteur saisit alors la Cour de cassation. Laquelle annule l’ordonnance, estimant que le juge du TGI a fait fausse route : l’article du décret du 25 mars 2016 n’interdisait pas à l’acheteur « d’exiger lorsque les spécificités du marché le justifient, que chaque membre du groupement candidat fasse preuve de l’aptitude requise pour l’exécution des prestations de celui-ci. »

Pour Me Antoine Alonso, les conclusions de cet arrêt sont claires : un acheteur peut demander à chaque membre d’un groupement qu’il atteste de ses capacités professionnelles. Et si cette condition n’est pas remplie, il a la faculté de déclarer la candidature irrecevable.

Cette décision est importante dans un contexte d’uberisation, souligne l’avocat, alors que se multiplient des « franchises » regroupant des auto-entrepreneurs. « On assiste aujourd’hui à une recrudescence de ce genre de sociétés, coquilles vides sans salariés et sans moyens matériels, qui ne font que mettre en relation les acheteurs et les prestataires. Bénéficiant de frais de structures réduits au minimum, ces organisations pratiquent une politique de prix très agressive et emportent de plus en plus de consultations. »

Référence, Cour de cassation, 27 janvier 2021, pourvoi N 18-20.783.

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