Transformation numérique du système de santé : s’inspirer de l’étranger

Né en 2018, le think tank « Numérique, DM et Santé » du SNITEM a sélectionné plusieurs projets déployés à l’étranger avec succès, dont la France pourrait tirer parti afin d’accélérer sa transformation digitale, aussi bien pour parfaire le parcours de soins, associer le patient à l’évaluation grâce aux DM connectés, ou mieux piloter les organisations.

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« Ne pas réinventer la roue ». Partant de ce principe, le cercle de réflexion « Numérique, DM et Santé » du SNITEM, composé d’experts, de représentants de patients, de soignants et d’industriels a identifié plusieurs actions menées par d’autres pays et qui pourraient permettre à la France d’amplifier le virage numérique, en évitant les écueils rencontrés par nos voisins. Trois thèmes majeurs ont été retenus en écho aux objectifs du plan Ma Santé 2022 : la transformation du parcours patient (accès, organisation et suivi améliorés grâce au numérique), l’évaluation des soins par les patients grâce aux dispositifs médicaux connectés, et enfin le numérique, outil de supervision et de pilotage.

Chef d’orchestre du parcours de soin

Côté optimisation du parcours patient, deux opérations de National Health Service (NHS) sont citées en exemple. La première concerne le suivi en temps réel. Baptisée « Lumeon », une plateforme de gestion de parcours de soins, interopérable avec les SI hospitaliers, sert de « chef d’orchestre » à la coordination des équipes, en aidant à la répartition des tâches de chacun des acteurs. En outre, des objectifs personnalisés peuvent être définis pour chaque patient qui remplit un formulaire automatisé. Ces données peuvent, en cas de dépassement de seuils, déclencher une alerte auprès des équipes soignantes et du patient, en lui demandant de prendre rendez-vous.

Dans un établissement du NHS, Lumeon a permis d’économiser l’équivalent de 1000 nuitées et le nombre d’annulations avant les opérations chirurgicales a chuté de 30 %. Pour le think tank, la solution a pour principal atout « de très bien intégrer, en particulier pour les patients chroniques, les dimensions organisation du parcours, suivi médical et accompagnement (ETP, etc.) et ce, dès l’amont de l’hospitalisation. »

Prédiagnostic par un chatbot

Autre outil numérique employé au Royaume-Uni, mais aussi aux Etats-Unis : Babylon Health, un chatbot capable de dialoguer, 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, avec un individu et de recueillir ses symptômes. En fonction des informations collectées, l’application pose un prédiagnostic à partir de bases de données. Si son algorithme l’estime nécessaire, le chatbot propose à la personne une téléconsultation avec un médecin. Le groupe du travail du SNITEM reconnaît que le système fait l’objet de controverses. Mais ses partisans arguent qu’il est disponible à tous les patients, quel que soit leur lieu de résidence, y compris dans des zones de désertification médicale, et fournit une alternative à l’engorgement des services d’urgences.

Deuxième grand sujet, l’association des patients à l’évaluation des soins. « La piste du Patient Recorded Outcome Measurement (PROM) est résolument à explorer », indique le groupe de travail. Il s’agit d’un indicateur mesurant le résultat attendu lié aux soins, en fonction de l’âge, de l’état du patient et des interventions chirurgicales. Aux Pays-Bas, 95 établissements bataves publient chaque année leurs résultats PROM. Ce qui permet aux pouvoirs publics de déterminer, par exemple, le montant du seuil en dessous duquel il est impossible d’assurer de la qualité et de déterminer le prix minimal d’une prothèse de hanche, notamment pour que cette qualité soit optimale.

Dans les établissements participant au programme, le taux d’infections post-opératoires a été divisé par trois entre 2008 et 2016. En France, avance le think tank, l’écosystème des DM, à domicile ou en établissement de santé, peuvent permettre de collecter les données. C’est pourquoi le cercle de réflexion suggère de lancer une expérimentation dans le domaine de l’apnée du sommeil, terrain favorable, avec un million de personnes traitées connectées.

Une plateforme pour associer les Londoniens à leur prise en charge en cas d’urgence

Dernier thème d’investigation : le numérique comme outil de supervision et de pilotage. Le cénacle du Snitem s’est tourné une nouvelle fois de l’autre côté de la Manche, où le système Coordinate My Care (CMC) de la NHS associe, depuis 2010, les Londoniens à leur prise en charge en cas d’urgence. La plateforme comprend un plan réalisé conjointement par les soignants et le patient et répertorie les préférences de ce dernier en matière de soins. Elle comprend aussi des informations pratiques (lieu de conservation de leurs médicaments, personne à contacter en cas d’urgence…), autant de données auxquelles accèdent tous les professionnels susceptibles de prendre en charge le patient : services d’urgence, médecins de garde, ambulanciers, SAMU…

Autre plateforme remarquable selon le collectif « Numérique, DM et Santé » du SNITEM, celle de l’Etat de New York. Mise en route il y a déjà treize ans, Healthix est capable de gérer 18 millions de patients. Elle a, selon l’étude, fait ses preuves durant la pandémie puisqu’elle a assuré un suivi des activités de soins, mais aidé au repérage des « poches » d’épidémie dans les quartiers ou les localités, et des patients à risques qui ont été destinataires de recommandations particulières. En conclusion de ses travaux, le think tank liste 5 préalables nécessaires au déploiement de solutions innovantes dans le pays : former les professionnels de santé aux usages du numérique, recruter des ingénieurs capables de répondre aux besoins des acteurs de l’écosystème de santé, sensibiliser les usagers, dégager des ressources financières pour aider hôpitaux et cliniques à passer un cap, maintenir la feuille de route du numérique en santé choisie l’année dernière et intensifier son application.

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