L’hôpital élastique ou comment tirer les leçons de la Covid pour un projet de reconstruction

Le sujet de l’adaptation des hôpitaux aux crises sanitaires a été un fil rouge de nombreuses interventions lors des journées de l’architecture en santé se sont tenues en octobre à Menton. Les cliniques universitaires Saint-Luc de Bruxelles et le CHU de la Martinique ont ainsi intégré la notion d’élasticité dans leur projet de reconstruction. Le principe : pouvoir s’étendre et se transformer rapidement en temps de crise mais aussi de pouvoir revenir facilement à la configuration classique.

© Epictura

Pour faire face à la pandémie, plusieurs réponses spatiales ont été trouvées pour pousser les murs. Certains pays se sont lancés dans l’ouverture de nouveaux hôpitaux covid, d’autres ont reconverti des bâtiments publics et déployé des structures modulaires ou légères de type « tente » pour renforcer les capacités existantes (lire notre article du 30 juin 2020 sur l’hôpital de campagne de Cayenne ). A New York, l’hôpital Mount Sinaï à New York a installé en urgence des systèmes d’extraction pour mettre les chambres en dépression.

Une zone pré-équipée aux urgences

Agées de plus de 40 ans, les cliniques universitaires Saint-Luc avaient une plasticité limitée : perte de flexibilité, parcours patient difficile et aucune zone d’expansion. L’établisse belge en tire les leçons suivantes dans le cadre de son projet de reconstruction. Pour le service d’accueil des urgences, une zone libre, pré-équipée en mode « précaire », a été prévue. Elle permettra au service de s’étendre en cas de Plan d’Urgence Hospitalier (PUH) qu’il soit infectieux ou traumatologique.

La décision a également été prise de rapprocher le service d’imagerie des urgences pour améliorer les prises en charge des AVC et en cas de PUH traumatologique. Le service est passé du -2 à une connexion directe avec l’installation de la consultation d’orthopédie juste en face.

S’agissant du confinement des espaces, une zone isolable a été identifiée. De quoi créer un bloc confiné avec deux accès séparés (entrée principale et entrée hôpital de jour). Il s’agit au total de quatre blocs en bout de bâtiment. Cette adaptation a nécessité l’extension des circuits propres et sales et des ventilations adaptées.

Chambres individuelles et reconvertibles

Côté unités de soin, le choix a été fait, dès la conception, d’avoir 80 % des lits en chambre individuelle, ce qui permet de maintenir l’activité. Avec des pièces modulaires qui peuvent être reconverties en cabinets de consultations ou en espaces administratifs. Une circulation verticale différenciée en fonction des flux a été prévue, et donc la possibilité de différencier les circuits infectieux si besoin. À la suite de la pandémie, la faculté de confiner graduellement une unité a été développée, en commençant par 6 lits au niveau 1, une unité de 24 lits au niveau 2 et un plateau entier au niveau 3.

Les polycliniques de consultations sont organisées en filières de soins, avec des grandes zones de consultations modulables et adaptables en fonction de l’activité. Les flux patients sont différenciables et un système de flux tiré a été mis en place avec l’envoi de SMS quand le médecin sont disponibles. En effet, la pandémie a montré que la distanciation physique est très difficile dans les salles d’attente.

Frontière souple au CHU Guadeloupe

Du fait de l’absence de renforts externes disponibles facilement, le CHU de la Guadeloupe doit absolument être en capacité de faire face à des pics plutôt qu’à des moyennes. « Nous devons être autonomes. Que ce soit pendant une pandémie, un séisme ou un cyclone, il faut pouvoir être agile et réactif », a insisté son DGA Cédric Zolezzi. Conçu par le cabinet d’architecte Architecturestudio, le nouveau bâtiment doit pour être résistant vis-à-vis de l’extérieur (vent, pluie mais aussi projectiles). Une enveloppe robuste permet aux équipes, à l’intérieur, de jouer leur rôle d’établissement de dernier recours.

Thierry Janson (Icade) a mis en avant la notion de « frontière souple », afin d’adapter le capacitaire en fonction des besoins médicaux. Depuis la crise COVID, l’agilité a été renforcée en surdimensionnant les fluides médicaux d’unités d’hospitalisation traditionnelles en les rendant analogues à la réanimation pour l’oxygénation haut débit. La possibilité de modifier localement les registres de ventilation est ajoutée, ainsi qu’un circuit patient infectieux spécifique, avec une réaffectation de la colonne logistique en lien avec les urgences.

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