Le « value based procurement », avenir de la fonction achats

Alors que les leviers classiques de l’achat atteignent leurs limites, une nouvelle approche commence à émerger, celle de l’achat par la valeur, qui prend en considération, dans le domaine de la santé, les impacts sur les patients, le personnel des établissements, les industriels et plus largement la société. La méthode a fait l’objet d’une conférence lors des dernières journées de l’achat hospitalier.

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Yves Verboven

71 % des appels d’offres européens publiés sont attribués en fonction du critère prix. « Ils ne détectent pas forcément l’offre économiquement la plus avantageuse », a rappelé Yves Verboven, directeur de l’accès au marché et des politiques économiques chez MedTech Europe, lors de la conférence sur le Value Based Procurement organisée lors des journées de l’achat hospitalier 2019. Résultat : des coûts finalement plus élevés et un rapport qualité/prix parfois médiocre. De surcroît, cette cristallisation sur le prix d’acquisition amenuise la concurrence et l’essor des innovations.

Une tendance internationale

D’où la montée en puissance d’une nouvelle approche, le Value Based Procurement, enfant à la fois du Value Based Healthcare, théorisé en 2006 par Michael Porter, et de la directive européenne 2014/24. Son objectif : obtenir le meilleur résultat – en fonction du montant investi – pour chaque partie concernée : le patient naturellement avec le ratio résultat des soins/coût de délivrance de ces résultats, mais aussi le personnel soignant, l’écosystème et plus largement la société.
« Au lieu de penser uniquement prix et technologie, il s’agit de penser à la valeur apportée afin d’améliorer le système de santé », a résumé Yves Verboven. Cette tendance à repenser ses pratiques d’achat est mondiale, a noté Pierre Lebon, directeur conseil innovation international du Resah : aux Etats-Unis, l’Association for Health Care Resource & Materials Management (AHRMM) encourage le recours à la démarche CQO (cost/quality/outcomes). En France, le programme Phare promeut désormais l’achat en coût complet et les marchés globaux de performance comprenant des engagements de résultats.

Un outil pour stimuler la réflexion sur l’ensemble des bénéfices attendus

Pour aider les professionnels à rallier ce nouveau paradigme, un outil sous la forme d’un tableur (disponible à la demande auprès de MedTech Europe) a été mis au point, comprenant plus de 35 critères, panorama des items susceptibles d’établir une comparaison de la valeur des offres, du coût de la formation nécessaire pour maîtriser le produit au confort du patient, en passant par la facilité d’utilisation par les personnels hospitaliers, le temps nécessaire d’usage, la facture engendrée par les consommables,  le prix pièces détachées, la réduction des réhospitalisations, la contribution au développement du système de santé ou l’impact environnemental. De quoi stimuler une réflexion sur l’ensemble des bénéfices attendus ou potentiels.

Expériences en Scandinavie


Pierre Lebon

« Il s’agit de sélectionner les critères les plus pertinents en fonction du besoin », a rassuré Pierre Lebon qui a insisté sur la nécessité de peser le ratio temps de réalisation de la procédure/gain escompté : « la méthode est d’abord à privilégier pour les achats stratégiques. » Cependant, des structures l’ont testée pour des besoins a priori simples. En Norvège, une autorité régionale a décidé d’inclure la douleur ressentie par les patients dans l’évaluation des offres lors de l’achat de cathéters. Le Stockholm County Council a modélisé, à l’occasion de l’achat de pansements, trois scenarii de patients pour lesquels chaque soumissionnaire devait indiquer le coût unitaire, le nombre de produits à utiliser, le temps de pose, les coûts logistiques ainsi que les risques de complication causés ou évités. MedTech Europe a recensé une cinquantaine de démarches VBP à travers l’Union.

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