EFS PACA : l’achat plaidoyer en faveur du décret Noël

La délégation PACA de l’Établissement français du sang (EFS) fait partie du cercle plutôt fermé des utilisateurs du décret du 24 décembre 2018. La formule a permis d’adapter une machine existante pour sécuriser des tests réalisés avant les transplantations. Un projet réussi qui incitera sans doute le ministère des Finances à réfléchir sur le sort de ce dispositif expérimental amené à s’arrêter à la fin de l’année.

© Epictura

La délégation régionale PACA de l’Établissement français du sang (EFS) n’a pas eu peur d’utiliser le décret du 24 décembre 2018 dédié aux achats innovants. Et elle s’en félicite. « Il faut être clair, nous avons réussi à obtenir ce qu’on n’aurait jamais réussi à avoir aussi rapidement dans d’autres conditions », affirme le docteur Christophe Picard. En juin 2019, le responsable du service HLA (Human Leukocyte Antigen), en déplacement dans un congrès, repère, lors d’une démonstration, un lecteur capable en résumé de distinguer cellules mortes et cellules vivantes.

Reconfigurer la machine et son logiciel

Il se dit que cette machine, après adaptation, pourrait rendre un fier service pour le test ultime, le « crossmatch », réalisé avant toute transplantation d’organes rénales, hépatiques, cardiaques ou pulmonaires, qui met en contact les sérums du receveur avec les cellules du donneur, afin de limiter les risques de rejets. Son laboratoire en pratique de 400 à 600 par an.

Réalisé au microscope optique à fluorescence, avec une estimation du pourcentage des cellules mortes grâce à un différentiel de couleur (rouge/vert), l’examen n’est pas infaillible en raison du défaut de la mise au point, ou de la fatigue oculaire des techniciens durant des opérations qui se déroulent le plus souvent entre 2 et 6 heures du matin. « Nous avons tenté d’installer un système photo au niveau du microscope mais cela n’a pas fonctionné », poursuit Christophe Picard.

Démontrer le caractère innovant


Lucas Buson, membre de l’équipe HLA, Christophe Picard et Olivier Fraissinet autour de la machine

Des contacts sont alors pris avec le fabricant, une PME danoise, qui accepte de reconfigurer sa machine et son logiciel d’interprétation en fonction des besoins de l’établissement. Des pré-tests sont faits durant l’été 2019 pour s’assurer de la faisabilité du projet, présenté à la direction générale de l’EFS à la rentrée. « Il a fallu justifier du caractère innovant de l’achat et démontrer qu’il ne s’agissait pas d’utiliser cette procédure pour contourner les règles. Je me suis appuyé sur le guide pratique de l’achat innovant, publié par Bercy », intervient Olivier Fraissinet, responsable juridique et de la commande publique.

 

« Nous avons eu la chance d’avoir un moteur à l’échelle régionale avec Olivier Fraissinet, et la présence, à l’échelle nationale, d’une direction de la recherche et de la valorisation de l’innovation. Le projet a pu avancer grâce à eux », complète le Dr Picard. Le marché « décret Noël » est lancé en 2020, et la machine livrée en décembre. « Cela a pris du temps pour expliquer le pourquoi du contrat et se mettre d’accord sur les engagements de chaque partie.

De son côté, la société a été obligée de traduire tous les documents du marché », poursuit Olivier Fraissinet. La crise Covid a évidemment mis son grain de sel. Domicilié aux Pays-Bas, l’ingénieur chargé de terminer la qualification de la machine n’a pas été autorisé à se déplacer.

Sécurisation des résultats des tests

Même si la nouvelle solution n’est pas encore passée en mode routine, Christophe Picard affiche sa satisfaction. L’automatisation de la lecture sécurisera les résultats. Le tout pour un prix attractif avec une remise non négligeable et deux années de réactifs grâce aux négociations. « Cet achat est le témoignage d’un excellent dialogue entre l’EFS et l’entreprise. Chaque partie a beaucoup donné pour arriver à cette solution, qui n’est pas une innovation de rupture, mais un produit existant adapté pour le rendre innovant », résume Olivier Fraissinet.

Un texte efficace

Les deux professionnels louent le recours au décret de décembre 2018. « Nous aurions pu choisir le partenariat d’innovation, mais cela aurait été sortir l’artillerie lourde. Le décret a permis une belle efficacité contractuelle et relationnelle », estime Olivier Fraissinet.
Le Dr Picard espère de son côté que ce dispositif réglementaire expérimental deviendra pérenne, même s’il souhaite une plus grande clarté des textes quant à la notion même d’innovation.

Il insiste aussi sur la nécessaire collaboration entre la commande publique, les services métiers et les industriels. « Si l’on veut avancer et innover, il faut forcément collaborer avec les entreprises. L’implication du fabricant a été un point essentiel. Il a compris le potentiel qui s’offrait, avec la possibilité de vendre la machine adaptée au crossmatch dans le monde entier. ».

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