Bientôt un label pour l’hôpital digital

L’appel à projets sur l’hôpital du futur, lancé par l’AP-HP fin 2017, débouchera prochainement sur un label « R2S for care » (ready to services) dont le référentiel devrait être publié avant l’été. Il sera décliné en deux versions, l’une pour les établissements sanitaires, l’autre pour les structures médico-sociales. En attendant, un guide des bonnes pratiques fournit déjà les bons réflexes de la digitalisation des établissements de santé.

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À Marmande, Eric Bardouillet, ingénieur technique et biomédical du centre hospitalier intercommunal, a toujours un projet de modernisation informatique en cours. Dernier en date : le changement du système d’alerte incendie. 2 millions d’euros réglés par son établissement pour rompre un marché en cours qui faisait payer trop cher chaque changement de paramètre nécessaire au moins une fois tous les trois mois.

« 5 % de nos locaux évoluent chaque année. Les médecins, même s’ils sont identifiés par leur spécialité et non pas par leur nom, changent d’affectation régulièrement », indique Eric Bardouillet. Car l’hôpital ne doit pas être incapable, par ses équipements antérieurs, de changer de technologie.

Numérisation disparate

C’est l’un des objectifs de la commission Smart Hospital à laquelle il participe au sein de l’Alliance Smart Buildings qui regroupe 600 petites et grandes entreprises autour de la digitalisation des bâtiments. Depuis les débuts de cette Alliance, en 2012, une norme a été édictée pour les bureaux.

« Mais un hôpital, c’est beaucoup plus complexe. Dans la commission Smart Hospital constituée fin 2017, nous avons défini une vision d’ensemble du système d’information d’un hôpital moderne » explique Marie-Paule Dayer, présidente de cette commission et account manager pour la santé d’un groupe international de services techniques.

« Car jusqu’ici, la numérisation s’est faite par-ci par-là, de façon disparate. L’idée est de le doter d’infrastructures d’information interopérables, transverses, capables de tirer un plus grand profit du numérique et d’accueillir les innovations sans avoir à ajouter de nouveaux systèmes ou faire de nouveaux travaux », poursuit-elle.

Un pense-bête

En juillet dernier, la commission a publié un pense-bête en 32 pages intitulé « De l’hôpital numérique au smart hospital ». Il pose les bases d’une digitalisation bien menée. Outre l’interopérabilité des systèmes, le grand chantier est celui de la donnée à créer et à gérer à l’hôpital. Elle touche à tout : ses moyens techniques, ses personnels, ses patients, leurs visiteurs, l’organisation des soins, leur suivi après l’hôpital et même l’environnement institutionnel, technique et humain de l’établissement.

Le document liste les grands chantiers. Par exemple, le carnet de santé numérique de l’Assurance maladie bâti autour du dossier médical partagé. Il y a aussi le système d’information technique de l’hôpital concernant l’immobilier, les équipements, jusqu’à l’internet des objets médicaux entourant le patient et aidant les soignant dans leurs tâches.

L’échange, le couplage des données doit permettre d’améliorer la performance de l’hôpital en utilisant mieux ses moyens disponibles. « Faire converger le bon matériel, le bon patient, le bon soignant, au bon endroit, au bon moment, décrit Marie-Paule Dayer, avec le souci de l’utilisation adéquate des données, des ressources humaines, des matériels, des ressources rares comme le temps ou l’énergie dans le respect de tous les protocoles. Et de leur évolution dans le temps. »

Géolocalisation des patients

Plusieurs « cas d’usage » idéaux sont décrits, illustré par des expériences déjà menées. Par exemple pour le parcours du patient. « Equipé d’un ticket à code-barre qu’il scanne tout le long de son parcours, le patient obtient du système les informations qui lui sont utiles à chaque étape et l’oriente vers les différents services. »

À la clinique de Courlancy Reims-Bezannes, le parcours ambulatoire est suivi à l’aide d’un bracelet muni d’un tag qui envoie des signaux à des capteurs muraux. Dans tous les cas, la géolocalisation interne des patients s’inscrit au cœur du travail à venir des ingénieurs hospitaliers.

« Jumeau numérique »

Mais la question des équipements médicaux apparaîtra aussi sur les écrans. Au CHU de Grenoble-Alpes, les brancardiers ont perdu 4 heures de moins par jour à courir après les quelque 60 brancards et fauteuils roulants. Ceux-ci ont été équipés d’un système de traçage, repérés par les 1500 bornes Wi-Fi dans l’établissement. À l’avenir, le numérique devrait fournir des indicateurs sur la qualité, la sécurité des soins et la bonne gestion des stationnements et des bâtiments.

En intégrant à leur système d’information les maquettes numériques BIM (Building Information Modeling) des données de construction et en y ajoutant les données de fonctionnement de l’hôpital, les ingénieurs hospitaliers devront pourvoir obtiendront un « jumeau numérique » de l’hôpital à partir duquel imaginer comment le faire tourner mieux. Le futur « R2S for care » sera ouvert à tous : il n’est pas destiné à labelliser uniquement des établissements qui ont intégré le numérique dès leur conception.

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