Marie-Ange Modika, en deux ans et trois mouvements

S’il y a les bottes de sept lieues, il existe aussi celles des deux ans, toute aussi efficaces. Chaussée de ces dernières, Marie-Ange Modika déroule en effet, depuis six ans, un parcours achats-logistique sans faille qui en 3 étapes, l’a menée jusqu’à la coordination territoriale des achats du GHT de Territoire de Guyane.

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Exercée aux techniques commerciales par une formation terrain de responsable fournitures (tubes, aiguilles, réactifs…) auprès d’un grossiste pour laboratoires et hôpitaux, Marie-Ange Modika traverse le miroir en 2016. Le centre hospitalier de Cayenne ne peut que s’en féliciter ! En effet, forte de son passé de fournisseur, sa nouvelle gestionnaire des ressources économiques des laboratoires (biochimie et anapathologie) va y optimiser la gestion des stocks en coopérant avec une trentaine de techniciens et une dizaine de biologistes.

À l’origine d’outils de reporting permettant de « fiabiliser et de sécuriser les process jusqu’à la liquidation des factures », elle contribue même à « réduire les dépenses du laboratoire d’une centaine de milliers d’euros. » Plus encore, « cette gestion a permis la condamnation d’une entreprise aux tarifs abusifs suite à une enquête de la haute autorité de la répression des fraudes », raconte l’intéressée… Un précédent d’importance sur ce territoire ultramarin où les établissements se voient « pieds et achats liés » face à des distributeurs locaux quasi omnipotents.

Un cadencier pour limiter les tensions

Ces succès rapidement engrangés appellent à l’évidence une promotion : dès 2018, Marie-Ange Modika est ainsi nommée responsable du magasin général du CH où un nouveau défi l’attend, et non des moindres : à la tête de ce service de 6 agents, essentiel à l’approvisionnement des sites de l’établissement (17 centres délocalisés de préventions et de soins/CDPS, centres médico-psychologiques, centres pénitentiaires ou instituts de formation), la jeune professionnelle de 28 ans doit affronter la crise sanitaire !

« Il a fallu rapidement s’adapter, et surtout savoir faire preuve de rigueur face à des fournisseurs peu scrupuleux livrant des fins de série et un personnel soignant en manque d’équipements de protection », se souvient-elle. En parallèle, elle s’attache aussi à optimiser la gestion des stocks : alors que 80 % des produits sont importés de métropole, par air ou mer, l’époque impose plus que jamais le recours à un cadencier qu’elle instaure pour « autant que faire se peut, maîtriser les délais et éviter les ruptures ».

La communication, levier d’optimisation

À nouveau, l’engagement porte ses fruits et vingt-quatre mois plus tard, Marie-Ange Modika intègre la fonction achat mutualisée (FAM) du GHT de Guyane dont elle devient responsable de filière pour le segment « Fournitures et services généraux » Sur ce périmètre d’importance (prestations générales et hôtelières, fournitures générales, équipements généraux, alimentation) où elle encadre quatre acheteurs territoriaux – deux basés au CH de l’Ouest Guyanais (CHOG) et deux au sein de l’établissement support de Cayenne – finie la logistique : « iI s’agit désormais d’instaurer des stratégies d’achats performantes », résume-t-elle.

Alors que le CH de Kourou (CHK) n’est établissement public de santé que depuis 2018 et que le CHOG situé à plus de 250 kilomètres dispose d’une clientèle spécifique en rapport avec les pays limitrophes tel le Suriname, la nouvelle responsable filière mise sur la communication en instaurant des relais – référents et acheteurs – dans chaque établissement partie. Et réussit à harmoniser process et pratiques au bénéfice de l’offre de soins locale.

Des réunions tournantes

Rompue désormais au fonctionnement des hôpitaux et des équipes, Marie-Ange Modika a donc franchi une dernière étape fin 2022 en devenant coordinatrice de la FAM, « des fonctions qui en appellent d’abord à la polyvalence puisée à ma carrière face à un service de 23,5 ETP où seuls 14 ETP sont en poste », sourit-elle. Défiée par des distances et des infrastructures qui impactent les flux, les coûts et les relations, la « bataille de l’harmonisation » continue toutefois.

Et se voit là encore relevée par une présence au plus près des équipes et prescripteurs locaux, d’abord par une « comitologie » très collaborative fondée sur des réunions tournantes au sein des établissements membres (depuis les « interfilières » jusqu’au CODIR Achats mensuel), ensuite par « autant de déplacements que nécessaires », appuie la coordinatrice.

Plus de la moitié des marchés déjà mutualisés

Résultat : la mutualisation fait son chemin, avec déjà 56 % des marchés ainsi contractés contre seulement 44 en 2021, « et d’autres consultations sont en cours, pour la gestion des déchets, le gardiennage, l’archivage ou encore le traitement des nuisibles », rapporte Marie-Ange Modika…

Des marchés minutieusement sourcés et construits, non seulement pour assurer des réapprovisionnements rapides (même à certains CDPS, uniquement accessibles par avion ou pirogue) mais également pour stimuler l’économie locale (création d’emplois, clauses d’inclusion sociale, marchés réservés…). Sans oublier les trois nouveaux hôpitaux de proximité prévus dans les mois à venir (Grand-Santi, Maripasoula, Saint-Georges de l’Oyapock) et la création d’un CHRU à horizon 2025… Là encore un défi de taille, mais comme Marie-Ange Modika aime souvent à le dire : « s’il n’y a pas de challenge, il n’y a pas de changement ! »

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