Les hospitaliers vus par les autres acheteurs publics

La pandémie a mis en lumière le travail des acheteurs hospitaliers, indispensables au bon fonctionnement des établissements de santé. Mais quel regard portent leurs homologues des autres fonctions publiques sur leur travail et leurs pratiques ? Même si les avis sont partagés, plusieurs reconnaissent qu’ils ont été précurseurs en matière de performance. Pour autant, l’idée d’aller tenter l’expérience à l’hôpital recueille des réponses nuancées.

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Que ce soit dans la territoriale ou dans la fonction publique d’État, la crise sanitaire est encore trop proche pour que les acheteurs publics ne l’abordent pas. Les hospitaliers ont-ils été plus sollicités ? Leurs contraintes ont-elles été plus fortes ? Ont-ils réellement contribué à lever des blocages dont tous profitent aujourd’hui ? Les réponses sont nuancées.

Ainsi, au Mans, Fabienne Amiard pose un bémol : « Avons-nous été moins sollicités que les hospitaliers, s’interroge la directrice du pôle marchés et achats publics de la communauté urbaine Le Mans Métropole ? Pas forcément, nous avons les EHPAD aussi dans notre giron et, en plus, dès mars 2020, nous nous étions organisés afin de pouvoir accueillir les enfants des personnels qui étaient sur le pont ».

L’impact de la crise Covid

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À la métropole Nice Côte d’Azur, au sein du service des marchés publics, Benoît Ferry est assez pondéré dans sa réponse : « Mécaniquement, avec l’afflux important de malades dans les hôpitaux et les besoins supplémentaires que cela a engendré, les acheteurs hospitaliers ont été très sollicités comparativement aux autres acheteurs publics, admet-il, cependant, les acheteurs territoriaux l’ont été également puisque de nombreuses collectivités ont assuré la distribution de masques et ont participé à la réalisation des campagnes de vaccination, comme c’était le cas ici ».

Au ministère de la Justice, pour Jean-Marie Estibals, il n’y a pas photo : « Bien évidemment, déclare ce chef de bureau adjoint coordinateur des achats des frais de justice, les hospitaliers ont été bien plus sollicités que nous ! ». Même son de cloche dans les Pyrénées-Orientales où, pour Nadia Helaine, chef du service de la commande publique à la communauté urbaine Perpignan Méditerranée, la question ne se pose même pas !

Les hospitaliers précurseurs

Les acheteurs hospitaliers ont-ils contribué à faire bouger les lignes ? Les avis sont là-aussi partagés, mais pour Nadia Helaine, aucun doute : « Les acheteurs hospitaliers ont été précurseurs de beaucoup d’évolutions en matière d’achat public ainsi qu’en matière de performance et de rationalisation ».

Vincent Place

Même son de cloche à la métropole européenne de Lille : « Assurément, on ne peut que mesurer les fruits du programme PHARE, reconnaît Vincent Place, directeur adjoint achats et logistique, et plus particulièrement des initiatives de professionnalisation de l’achat hospitalier dans ma région, les Hauts de France, ces dernières années ».  Avis opposé au Mans où Fabienne Amiard ne pense pas que, dans les hôpitaux, les acheteurs aient contribué à eux seuls à faire avancer la fonction.

Selon Jean-Marie Estibals, les acheteurs hospitaliers ont cependant permis de débloquer de nombreuses situations : « Mais c’est un peu à leur insu, car la mise en lumière des problématiques liées aux approvisionnements à l’hôpital a permis d’interpeller les politiques sur la question d’appréhender la fonction achat à l’hôpital, dit-il, les efforts qui ont été faits pour mieux approvisionner sont réels et méritent d’être soulignés ».  Pour sa part, Benoît Ferry relativise : « Le Covid a fait bouger les lignes à tous les niveaux et nous avons tous relevé la vulnérabilité du système face à ce type de crise ».

Postuler dans un hôpital ? Pourquoi pas…

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Tenter l’aventure dans l’achat hospitalier ?  L’hôpital, dont l’état de santé inquiète plusieurs acheteurs, ne semble pas faire saliver. Ce que traduit avec diplomatie Christophe Amoretti-Hannequin qui, après avoir fait une partie de sa carrière dans la territoriale, est aujourd’hui conseiller finance responsable et achats à France Urbaine : « La fonction publique hospitalière ? ce n’est pas dans mes projets ». Néanmoins, la santé ne fait pas non plus effet d’un épouvantail. Plusieurs d’entre eux s’interrogent, comme Fabienne Amiard, au pôle marchés et achats publics du Mans Métropole : « Et pourquoi pas ? ».

Au ministère de la Justice, Jean-Marie Estibals, lui, ne ferme pas la porte,  bien qu’il émette quelques réserves : « Si le politique suit, et si la prise de conscience de l’achat métier est mise en avant, et pas seulement la chasse aux coûts, peut-être… ». C’est peu ou prou la position de Nadia Helaine qui, à Perpignan, laquelle ne s’interdit rien « pour le moment ». La chef du service de la commande publique de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée reflète assez bien la température ambiante car, globalement, aucun praticien ou presque ne repousse l’idée d’un détachement.


1 réaction
  1. Jean Claude LE GUEN Le Guen dit :

    Assurément les acheteurs hospitaliers ont réalisé un énorme effort de professionnalisation à travers le programme PHARE, depuis 2012 : plan d’action achats annuel, diffusion des bonnes pratiques (via les groupes ARMEN), développement de la massification et de la standardisation, formations diplômantes pour les acheteurs, etc. Tous ces efforts ont rendu la fonction passionnante, d’autant plus que le panel achats des hospitaliers est le plus vaste de la fonction publique. Au delà des achats classiques (travaux, alimentaire, nettoyage, textile, formations, informatique, etc.), nous gérons les équipements médicaux, les laboratoires, les médicaments, les dispositifs stériles et bien d’autres besoins spécifiques.
    Pour autant, rejoindre le monde hospitaliers de la part de nos collègues Etat ou collectivités est particulièrement rare, la FPH étant la plus mal payée des 3 fonctions publiques !

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