Définir les besoins, c’est dialoguer

Responsable du pilotage et de la performance achat au sein des Hôpitaux universitaires de Marseille AP-HM, Franck Guyot est convaincu que seul un dialogue sérieux avec les services, une analyse approfondie de leurs besoins, permettent de les traduire en fonctionnalités. Pour lui, c’est dès cette étape que l’on peut réaliser l’essentiel des gains achat. Dans ce but, et pour mieux dimensionner les besoins, la direction des achats de l’AP-HM a élaboré une fiche de qualification  (à télécharger).

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achat-logistique.info : Quelles sont les bonnes questions que l’acheteur doit poser aux services ?

Franck Guyot : « Il convient d’effectuer une analyse fonctionnelle au niveau de la définition des besoins afin de traduire ce besoin en fonctionnalités. Un outil simple, « la bête à cornes », permet de répondre aux trois premières questions les plus importantes : à qui le produit ou le service est-il utile ? Sur quoi agit-il ? Dans quel but ?

Après ces trois premières questions nous devons interroger le besoin auprès du prescripteur. Nous le faisons avec une fiche de qualification des besoins en fournitures et services, adaptable, et qui permet de répondre tout à un ensemble de questions (à télécharger Fiche qualification des besoins AP-HM) .

Cet acte préalable permet de formaliser au mieux l’expression des besoins opérationnels dans le cahier des charges, et doit permettre notamment aux entreprises de bien comprendre la demande pour proposer des produits conformes, mais également de garder une juste neutralité afin de permettre la concurrence. »

achat-logistique.info : Comment traduisez-vous l’expression réelle des besoins dans le marché ?

Franck Guyot

Franck Guyot : « La description des spécifications techniques du marché n’est pas toujours aisée du fait des sujets évolutifs ou techniquement complexes. Pour éviter les procédures infructueuses, comme bien d’autres, nous recourons au sourcing. Nous avons à cet effet développé différents outils pour nos acheteurs : courriel invitation sourcing, fiche sourcing, fiche de synthèse, mise à disposition du guide « le sourcing opérationnel ».

Une autre pratique doit être menée. Une grande partie de nos besoins sont également les mêmes que d’autres structures hospitalières. Il convient dès lors d’interroger nos camarades en réalisant un benchmark visant à comparer les performances et les pratiques en vue d’optimiser notre cahier des charges : recueil des retours d’expériences, exemples de DCE, liste des entreprises, niveaux de prix… À cet effet nous avons mis à dispositions de nos acheteurs un outil, une trame d’entretien, afin de faciliter le benchmark. »

achat-logistique.info : Utilisez-vous d’autres outils spécifiques avant de monter le marché ?

Franck Guyot : « Parmi l’ensemble des outils que nous mettons à disposition de nos acheteurs, nous avons également un fichier des bonnes pratiques des différentes vagues ARMEN du programme Phare, une fiche « type de leviers » afin d’identifier les gains possibles et ajuster les spécifications techniques, une fiche stratégie achat pour synthétiser l’ensemble des démarches menées avec le prescripteur, un fichier « check-list » permettant aux responsables d’effectuer une check-list du cahier des charges afin de vérifier la bonne complétude de la définition des besoins pour les dossiers les plus importants. »

achat-logistique.info : Quels autres leviers utilisez-vous pour optimiser les gains achat ?

Franck Guyot : « Une fois le besoin défini, l’acheteur doit procéder au calcul de la valeur estimée afin d’identifier la procédure à mettre en œuvre pour son marché public, il doit également traduire le besoin dans un document contractuel, en principe le CCTP, en exprimant les spécifications techniques, en termes de performance à atteindre ou d’exigences fonctionnelles, en déterminant les besoins par référence à des spécifications techniques (normes reconnues au niveau national ou européen), en prenant en compte les objectifs de développement durable (pour ce faire il est possible d’utiliser les ressources de la DAJ de Bercy : aspects économiques, sociaux, environnementaux).

En cas d’incertitude sur les besoins, il est possible de faire appel aux dispositifs prévus par la commande publique : utilisation des accords-cadres pouvant donner lieu à la conclusion de marchés subséquents ou à l’émission de bons de commande, recourir à la procédure concurrentielle avec négociation, ou encore recourir au dialogue compétitif. »

achat-logistique.info : Quel est l’un des plus grands risques d’une mauvaise définition des besoins ?

Franck Guyot : « Une mauvaise définition des besoins peut se traduire par une prolifération d’avenants. Les acheteurs connaissent parfaitement les risques alors que, le plus souvent, les services demandeurs n’en ont pas conscience. Après la phase de négociation entre acheteurs et services demandeurs (parfois synonymes de tensions tant ils n’ont pas conscience des coûts cachés), on pourra dire que le besoin est parfaitement défini. Restera donc à l’acheteur à traduire techniquement l’évolution de ce besoin dans le marché. »

 

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