Danny Havenith : faire front commun dans la diversité

Union d’organisations et de centrales d’achat européennes de la santé, EHPPA (European Health Public Procurement Alliance) fête ses 10 ans cette année. Le sommet que l’association vient d’organiser à Bruxelles avec Health Proc Europe incarne parfaitement sa vocation, celle de partager les informations et les pratiques, de confronter les idées, mais aussi de peser face aux fournisseurs, comme nous l’explique son président Danny Havenith.

Acheteurs de la santé de tous les pays, unissez-vous. C’est en substance le discours que tient Danny Havenith.  « Notre secteur se caractérise par le peu de maturité en matière de coopération », estime-t-il. Le professionnel belge sait de quoi il parle. DG de MercurHosp, centrale d’achat des hôpitaux wallons et de Bruxelles, il occupe aussi, depuis un an, la fonction de président d’EHPPA, association qui fédère 12 organisations (centrales d’achat, agences) venus de 10 pays européens.

Des problématiques communes à tous les acheteurs européens

Née en 2012, à l’initiative du Resah et de NHS Commercial Solutions, cette alliance est d’abord un espace de rencontres et de partage de bonnes pratiques. Voilà pourquoi l’EHPPA a été, avec l’association Health Proc Europe, l’une des chevilles ouvrières du 1er sommet paneuropéen de l’achat de santé à Bruxelles qui s’est tenu les 20 et 21 septembre. « Il était nécessaire de rassembler l’écosystème autour d’une table qui ne soit pas virtuelle », argumente Danny Havenith, « le directeur des achats ne doit pas rester dans son coin, roi en son royaume. Apprendre ce qui se fait ailleurs, pouvoir échanger, c’est comme de l’eau pour quelqu’un qui vit dans un désert », poursuit celui qui a le sens de la formule.

Le sommet de Bruxelles a confirmé que les problèmes qu’affrontaient les acheteurs ignoraient les frontières. L’absence de bases de données fiables entrave par exemple le mouvement vers la digitalisation. « Lorsqu’on demande des statistiques de consommation de médicaments, on reçoit des éléments de la pharmacie, de la comptabilité et des achats. Et rien ne coïncide », confirme-t-il. Ce qui limite la transparence, ne serait que sur la comparaison des prix. « Quand on fait du benchmark à l’intérieur d’un même pays, on constate que les établissements achètent chacun de leur côté et obtiennent des tarifs différents. »

Ne pas présenter l’achat durable comme une sorte de Graal

Pour le président d’EHPPA, cette transparence et cette digitalisation sont nécessaires à la transition vers un achat plus responsable, autre sujet majeur du sommet de Bruxelles. « Je suis profondément opposé au fait d’isoler l’achat durable et d’en faire un Graal. La démarche fait partie d’un ensemble. Chaque structure est tributaire de son environnement, de son organisation, de ses fournisseurs, de sa logistique. L’approche durable nécessite d’avoir un projet interne ».

Comme son nom l’indique, l’EHPPA est aussi une alliance. Un moyen de faire front commun ? « Bien sûr, il s’agit de faire front commun dans la diversité », répond aussitôt Danny Havenith. Car la situation dans les différents pays est hétérogène, de MercurHosp, idée de directeurs d’hôpitaux, à l’Autriche, où les régions ont la compétence santé et ont créé des centrales pour leurs hôpitaux.

Acheteurs atomisés face à une industrie globalisée

« Partout dans l’Union, les acheteurs publics sont soumis à une même législation. Pourtant, nous sommes très fragmentés et nous faisons face à une industrie hyper globalisée et très organisée », remarque Danny Havenith. Se comparer, se communiquer des données, « nécessite de la maturité et de la confiance », prévient-il. « Je crois qu’il fallait les premiers dix ans de l’EHPPA pour faire connaissance, créer des liens, et avancer par petits pas », juge l’acheteur belge.

Pour lui, la pandémie, véritable onde de choc, a permis d’accélérer le mouvement, en montrant que le défaut de coordination des achats à l’échelle européenne était préjudiciable. « La crise Covid a montré que de ne pas avoir de souveraineté industrielle dans le secteur de la santé est un problème. Et que le supply chain est un sujet ». Sans surprise, les groupes de travail de l’Alliance phosphorent donc en priorité sur la sécurisation des circuits d’approvisionnement et la clarification juridique des marchés conjoints transnationaux.

Elargir le cercle aux pays de l’Est

Agée de seulement dix ans, EHPPA a vocation à encore grandir. D’abord en fédérant les opérationnels. « Depuis que je suis président, ce que l’on cherche à faire, c’est d’incorporer ceux dont le métier est d’acheter, les personnes qui vont au charbon », explique-t-il. « Nous avons évidemment besoin de ceux qui ont une vision, mais aussi de ceux qui, au quotidien, mettent en place l’achat durable, la digitalisation, ou qui améliorent la supply chain. »

Ensuite en élargissant le cercle.« Nous voulons couvrir toute l’Europe, ce que reflète également le nom de la rencontre à Bruxelles : Pan European Hopital and Healthcare Summit », précise-t-il. L’alliance est donc ouverte à l’arrivée de nouveaux adhérents. « À condition de partager nos valeurs, d’être ouvert d’esprit, de s’investir dans des projets communs pour avancer collectivement. On ne peut pas seulement prendre et ne rien donner », insiste le président d’EHPPA. Des pays de l’Est pourraient à terme intégrer l’alliance. « La Pologne et l’Estonie ont pris contact avec nous », illustre Danny Havenith.

 

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