Spaser de Strasbourg, saison 2

Après avoir adopté au printemps 2018 leur premier schéma de promotion des achats socialement et écologiquement responsables (Spaser), la ville et l’eurométropole ont rédigé une nouvelle matrice valable jusqu’en 2026. Pour aller plus loin, notamment en s’adossant sur les 17 objectifs de développement durable de l’ONU, tout en évitant de faire peser trop de contraintes sur les candidats potentiels aux consultations.

© Epictura

À Strasbourg, on en est déjà à la 2e génération de Spaser. En juin dernier, les conseils de la ville et de l’eurométropole ont en effet donné leur approbation au document, véritable colonne vertébrale du caractère responsable des achats des deux collectivités (2 500 marchés par an pour une dépense d’environ 430 millions d’euros). À l’unanimité, précise aussitôt Christian Brassac, à la fois conseiller municipal délégué à l’achat et à la commande publique et vice-président métropolitain chargé de la commande publique responsable.

Passer un cran au-dessus

Christian Brassac © unistra/Catherine Schöder

Le résultat d’un long travail collaboratif commencé en octobre 2020. Quatre groupes de travail avec chacun une dimension – environnement-santé, sociale et solidarité, éthique-équitable et gouvernance -, 15 ateliers, une cinquantaine de participants, comprenant des élus de la majorité et de l’opposition, des citoyens (acheteurs dans le privé), les principales directions acheteuses et des partenaires extérieurs (Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire, Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, les mobilités et l’aménagement…). Et une rédaction validée par tous, au mot près, insiste Christian Brassac.

Qu’apporte le Spaser, 2e du nom ? « L’objectif, c’est de passer un cran au-dessus », expose Bruno Koebel, DGA chargé des finances, du patrimoine, des partenariats et logistique durables, « le premier Spaser a été un élément d’impulsion en interne », avec un renversement des principes. « Avant son adoption, les services pouvaient décider ou pas d’insérer des clauses sociales et environnementales », indique-t-il. Depuis, ils doivent le faire « chaque fois que c’est possible », précise Hélène Vurpillot, cheffe du service des achats. Et justifier leur décision dans le cas contraire. Une dynamique élargie hors les murs, aussi bien vers les communes membres, qu’en direction des entreprises. « Le schéma précédent avait été présenté lors de notre salon de l’achat public pour montrer aux fournisseurs le sens de l’évolution de notre politique d’achat », illustre Bruno Koebel.

La question de l’égalité femme/homme

Au menu du nouveau Spaser (à télécharger), le renforcement des actions tous azimuts, de l’insertion au recours aux énergies renouvelables en passant par le bannissement des perturbateurs endocriniens, l’utilisation de matériaux de construction biosourcés ou encore la préférence donnée au vrac plutôt qu’aux petits conditionnements. L’amélioration de la gouvernance est également à l’affiche. Avec la définition d’indicateurs pour mesurer l’impact des actions du Spaser et la création d’un comité technique et d’un comité de pilotage chargés de suivre son application.

Plus exigeant, le Spaser 2 explore aussi d’autres thématiques. Comme l’égalité femme/homme. « C’est un sujet compliqué juridiquement, mais qui me tient à cœur », commente Christian Brassac. Symbole de la volonté strasbourgeoise de ne pas occulter la problématique, un questionnaire a fait son apparition dans les DCE. « Nous donnons la possibilité aux entreprises de s’exprimer sur leur façon d’aborder l’égalité », continue l’élu alsacien. « Et sur les engagements qu’ils prendraient s’ils étaient attributaires d’un marché. Ce n’est pas obligatoire et ce n’est pas un élément de notation », précise Hélène Vurpillot.

La ligne de crête : ne pas faire fuir les soumissionnaires

Autre nouveauté : l’extension de la définition de l’insertion, jusqu’à présent principalement destinée aux personnes éloignées de l’emploi, chômeurs de longue durée et personnes en situation de handicap. « J’ai voulu introduire l’insertion au sens professionnel du terme, c’est-à-dire la formation par alternance, qu’elle soit pré-bac ou post-bac », indique Christian Brassac. Troisième spécificité du nouveau schéma : l’adossement aux 17 objectifs développement durable (ODD) des Nations-Unies. « Le Commissariat général au développement durable m’a assuré que nous étions le seul Spaser français dans ce cas », pointe l’élu.

Cependant, enchaîne immédiatement le vice-président, « lors de la rédaction, on a toujours gardé à l’esprit le fait de ne pas être trop contraignant pour éviter de ne plus avoir de soumissionnaires. C’est une ligne de crête. » « Nous sommes très attentifs aux réactions des entreprises et des fédérations professionnelles. Nous préférons en faire des alliés et des contributeurs plutôt que des acteurs qui subissent des clauses excessives de notre part », corrobore Bruno Koebel.

Un document vertueux à démocratiser

La proposition du récent rapport sur les achats responsables (lire notre article du 22 octobre 2021) de passer le seuil du Spaser à 50 millions fait sourire Christian Brassac. « C’est évidemment très vertueux. Mais aujourd’hui seulement 20 % des 160 collectivités qui doivent rédiger un Spaser l’ont fait. Parce que l’obligation n’est pas assortie de sanctions. »

De son côté, Bruno Koebel avance l’idée de conditionner certains crédits du Plan de relance à la rédaction du schéma. De quoi déclencher une épidémie de Spaser… Selon lui, le document devrait concerner tout acheteur public. « Il peut tenir sur une page recto-verso. Et on pourrait même avoir des modèles de Spaser simplifiés et partagés », suggère-t-il.

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