Nantes Métropole : des critères RSE nouvelle formule

En 2018, le Conseil d’Etat avait jugé les critères d’attribution des marchés de Nantes Métropole en matière de responsabilité sociétale des entreprises (RSE), trop vagues ou trop généraux. La collectivité les fixe désormais par type d’achats.

© Epictura

Nantes se veut un territoire défendant la responsabilité environnementale et sociale (RSE) des entreprises. « La social-écologie sur laquelle nous avons été élus passe par nos marchés et par des critères d’attribution relatifs à la RSE. C’est un sujet sur lequel Nantes, qui y travaille depuis 2010, veut se montrer leader en France », confirme Hervé Fournier, élu chargé de la commande publique à la métropole nantaise.

Relance après la décision du Conseil d’Etat

André Sobczak © P.Garçon/Nantes Métropole

« Mais un paradoxe persiste, souligne son collègue André Sobczak, élu en charge des PME. Il est toujours difficile de valoriser les engagements sociaux et environnementaux des entreprises compte tenu des règles actuelles sur les marchés publics. Ces critères peuvent être considérés comme trop éloigné de l’objet du marché. »

 

 

 

La collectivité relance le chantier après des déconvenues devant les tribunaux. « En 2018, le conseil d’Etat a mis un coup d’arrêt à nos achats sur critères RSE en considérant, dans un cas, que nos exigences en la matière étaient trop générales et dans l’autre, que nos critères d’évaluation concernant les entreprises elles-mêmes étaient trop éloignés de l’objet du marché (CE, 25 mai 2018, n° 41758, NDLR). Nous avons revu notre copie et pour éviter ces écueils, décidé d’élaborer des critères différents selon la famille d’achats. Ce travail, entamé fin 2019, perturbé par la crise sanitaire puis les élections, reprend aujourd’hui », assure Hervé Fournier.

Plus que 12 critères au lieu de 35

Jusqu’en 2018, Nantes utilisait une grille établie dans le cadre d’un projet de territoire avec les autres collectivités locales, les réseaux et les fédérations patronales. L’objectif était double : pousser l’économie locale vers la RSE et valoriser les efforts des entreprises en ce sens. 35 critères permettaient grosso modo de définir l’entreprise comme responsable au sens de la RSE. Ils fournissaient une note comptant pour 15 % de la note technique d’un dossier.

La métropole a procédé à deux changements. Suite aux remarques des entreprises, elle a réduit le nombre de critères, jugé trop élevé, pour n’en garder que 12 correspondant aux cinq domaines de la RSE : la protection de la planète ; le social ; l’ancrage territorial ; la gouvernance ; une activité économique responsable. Et elle a adapté la grille à six familles d’achats : travaux, espaces verts, transport de personnes, prestations intellectuelles, garderies et l’alimentaire. Ce qui couvre la quasi-totalité des 2000 marchés qu’elle lance par an.

Premier test dans le transport de personnes

Hervé Fournier © P.Garcon/Nantes Métropole

La nouvelle formule a passé le test en septembre dernier. Un marché à bons de commande de plusieurs centaines de milliers d’euros portant sur le transport d’enfants pour les 114 écoles primaires et maternelles de la ville, vers les équipements sportifs, les piscines, lieux de spectacles, n’a fait l’objet d’aucun référé précontractuel auprès du tribunal administratif. C’est pourtant le type de contrat observé par les fédérations professionnelles des transporteurs et les grands groupes de transport par car (Keolis, la filiale de la SNCF, Transdev, RATP Dev). « Nous avons même eu très peu d’interrogations, de demandes d’explications sur les nouveaux critères, avant le dépôt des offres », se félicite Hervé Fournier.

La question environnementale était mesurée sur deux thèmes : la consommation d’énergie produisant des gaz à effet de serre et le recyclage des matières premières. Le social était étalonné à travers les conditions de travail, la lutte contre les troubles musculosquelettiques (TMS) – via une ergonomie des postes de conduites adaptés à la morphologie des conducteurs ou le taux de formation des conducteurs employés pour ce marché aux bons gestes et aux bonnes postures – et l’emploi de personnes handicapées.

Le caractère responsable de l’activité économique de l’entreprise était jugé par l’attention à acheter de manière responsable dans le cadre de l’exécution du marché. L’ancrage territorial était coté en fonction des actions menées pour lever les freins à l’emploi et en faveur de l’insertion sur le territoire. La bonne gouvernance était évaluée en fonction du respect des réglementations et de l’évaluation de la qualité du travail par des tiers. « On demande très souvent des documents existant déjà dans l’entreprise, comme le DUER, le document unique d’évaluation des risques », précise Hervé Fournier.

Un marché groupé de titres-restaurants

En février dernier, un groupement de commandes de titres-restaurants par plusieurs établissements publics et communes de l’agglomération, pour leurs salariés, est aussi passé « comme une lettre à la poste » avec le nouveau système RSE. Cette fois, les douze critères ont ignoré l’ancrage territorial du fournisseur. Ils se sont concentrés sur l’aspect social : niveau de revenus moyen, types de contrats et avantages salariaux des équipes de production des supports des tickets-restaurants.

Sur la bonne gouvernance, ils demandaient des capacités de participer aux décisions de l’entreprise sur l’exécution du marché. Le souci de l’environnement était fort et s’attachait aux matières employées pour la fabrication de supports de titres-restaurants, aptes au recyclage ou pas, ainsi qu’à la filière logistique utilisée pour leur distribution. Au titre d’une économie responsable, deux derniers critères visaient la gestion des emballages et des déchets.

« Cette adaptation représente un travail de longue haleine. Un ou deux ans seront nécessaires pour boucler les douze critères de toutes les familles d’achats. Nous sommes guidés, pour ce qui concerne Nantes Métropole par le 2ème SPAR (Schéma de promotion des achats durables) que nous signons à la fin de l’année. Mais c’est surtout une demande des entreprises locales qui veulent monter en compétence sur ce sujet », indique Hervé Fournier.

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