Le CHU Grenoble nettoie durablement

En quinze ans, le CHU de Grenoble est parvenu à désinfecter presque sans produit chimique. Les clés : vapeur très chaude, bandeaux à microfibres désormais recyclables et usage raisonné des produits d’entretien. Retour sur ce parcours présenté le 19 octobre durant le séminaire des directeurs achats et logistique hospitaliers au GHU de Paris.

© CHU Grenoble Alpes

« Toute la difficulté est de nettoyer sans chimie mais en évitant les risques infectieux, en particulier les maladies nosocomiales, le tout en économie responsable. » C’est ainsi que Karen Vancoetsem, cadre de santé au service d’hygiène, résume le processus qui a conduit le CHU de Grenoble à tout nettoyer, des sols au matériel biomédical quasiment sans produits chimiques.

La vapeur demande beaucoup de rigueur de mise en œuvre

L’aventure a commencé en 2005, en néonatologie, dans le nettoyage de la centaine d’incubateurs pour grands prématurés. C’était avec de premiers nettoyeurs à la vapeur d’eau. La littérature scientifique, les études en avaient attesté : la haute température assure une désinfection de très haut niveau.

Simple précaution, sa mise en œuvre demande une grande rigueur. La température seulement élevée, accroit, les risques infectieux. Il faut donc former, reformer les agents et recommencer souvent surtout dans le contexte actuel d’importants turn-over dans les services.

Jusque dans les zones à atmosphère contrôlée

Bionettoyage à la vapeur d’incubateurs en néonatologie © CHU Grenoble Alpes

Néanmoins le CHU de Grenoble a adopté cette méthode. Tous les services disposent d’au moins un nettoyeur à la vapeur. Pour les chambres, à chaque sortie de malade. Même pour les espaces à atmosphère contrôlée, la pharmacotechnie, les zones de reconstitution des cytotoxiques, qui sont lavées à la vapeur au moins une fois par mois. Point crucial, plusieurs constructeurs de nettoyeurs à la vapeur d’eau ont vérifié que leurs matériels n’altèrent pas non plus le matériel biomédical.

Deuxième élément, ce nettoyage à la vapeur emploie aujourd’hui des balais à microfibres synthétiques, tellement fines qu’elles atteignent les anfractuosités de n’importe quel sol. Les bandeaux de microfibres se gorgent de saleté comme un sucre dans le café. Pour nettoyer les sols, au CHU de Grenoble, en 2009, on utilisait encore des balais à frange Faubert et des détergents.

À partir de 2011 des bandeaux de microfibres, de plus en légers, ont été généralisés, renvoyés pour nettoyage à la blanchisserie. En 2018, ces bandeaux sont devenus très techniques, 100 % polyester, utilisés seulement avec de l’eau chaude. Depuis cette année, ils sont en plus recyclables.

Nettoyage plus exigeant des microfibres

© CHU Grenoble Alpes

Deux fois plus légers que les premiers bandeaux à fibres, ils devaient permettre à la blanchisserie de faire des économies, de diminuer l’emploi de lessive et le nombre de cycles de nettoyage. Finalement, pas tant que cela ! Car les microfibres qui attrapent efficacement la saleté ont aussi plus de mal à la relâcher. Elles doivent être davantage brassées.

La blanchisserie a augmenté les quantités de produit nettoyant et le nombre de cycles de lavage. D’autant qu’une bactérie, le bacillus, potentiellement mortelle pour les prématurés, se développe dans les bandeaux. L’idéal est aussi que le nettoyage soit précédé dans les services d’un balayage humide à la gaze pour éviter que la blanchisserie récupère, par exemple, des épluchures de clémentine et du film d’emballage des bonbons ou des biscuits.

La révolution du désinfectant en spray

Le CHU de Grenoble a aussi revu sa copie sur un troisième aspect des nettoyages, celui des produits détergents et désinfectants. Objectif : en faire un usage raisonné. Sur 16 produits d’entretien, parfois toxiques et polluants, il n’en a retenu que cinq. Et en a ajouté deux : un désinfectant prêt à l’emploi en pulvérisation et un produit « monobrosse » pour remplacer tous les décapants de cire, etc. Résultat, en 2018, il a rejeté 110 000 litres de produits chimiques dilués en moins dans les réseaux d’égouts.

Sa consommation de désinfectant n’a cessé, depuis, de diminuer. Notamment grâce au nouveau spray qui a remplacé les bacs de désinfectant dilué dans lesquels les services faisaient baigner leur matériel – 100 litres par jour et par service – alors que les nettoyer à la mousse suffit. Grâce à ce nouveau moyen, l’emploi de lingettes désinfectantes diminue. Celles que l’on a abondamment retrouvé un peu partout au moment du Covid, alors qu’elles étaient réservées au matériel de soins.

Micro-blanchisserie

Les prestataires de nettoyage, chargés des parties communes, des bureaux et des espaces de circulation, ont pris en marche cette petite révolution. Le marché comportait des critères de développement durable et de RSE. En plus d’adopter le nettoyage vapeur et l’utilisation de microfibre, il a proposé une gamme de produits sans composés organiques volatiles et des microfibres éco-labellisés. Il a installé une micro-blanchisserie sur place pour traiter ses bandeaux. Autant d’éléments de progrès rassemblés dans un guide de l’éco-nettoyage publié par l’ARS de la Région Auvergne-Rhône-Alpes.

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