L’appui vélo, modèle de marché réservé à Nantes

La ville de Nantes veut intensifier sa politique d’achats responsables, notamment grâce aux marchés réservés. De quoi former des personnes éloignées de l’emploi, leur redonner un cadre et leur permettre de remonter en selle, à l’image de ce contrat de fabrication d’appuis vélos passé à une entreprise locale d’insertion.

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Après avoir adopté son SPAR (Schéma de promotion des achats responsables) en juin dernier, la ville de Nantes a organisé une journée de l’achat responsable et de l’innovation, le 16 novembre, qui a remporté un franc succès. Acheteurs des grands et petits donneurs d’ordre publics ont rencontré une kyrielle d’entreprises se présentant sur des sujets émergeants. Beaucoup issues de l’économie sociale et solidaire (ESS).

Produire des externalités positives pour le territoire

La ville veut accélérer sur les marchés réservés. 40 aujourd’hui dans des domaines relativement variés. Aux classiques entretien d’espaces verts, collecte et traitement de déchets, s’ajoutent le nettoyage de linge des SDF, la déconstruction de bâtiments (une serre horticole), le tri et le recyclage de pain séché, la culture et de la fourniture de denrées alimentaires, l’achat et de location de matériels médicaux. « C’est appelé à se développer parce que c’est un objectif politique, explique Laurent Gollandeau, directeur de la commande publique.

« Au croisement d’une stratégie économique qui a besoin d’aborder des sujets nouveaux comme le recyclage, le réemploi de matériaux et de produire des externalités positives pour le territoire comme former puis ramener vers l’emploi des personnes qui en étaient éloignées. C’est pourquoi nous voulons que l’ESS se renforce et se structure pour répondre à nos appels d’offres ».

Entreprise formatrice

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Exemples de ces marchés réservés, trois lots d’un contrat de fabrication et d’installation d’appuis vélos ont été confiés à Atao. Avec une grosse centaine de salariés en moyenne, œuvrant dans quatre grands secteurs (réparation, revente, location de voitures, de vélos y compris électriques ; fabrication d’objets et d’équipements d’espaces publics ; entretien d’espaces verts ou naturels ; réparation de jouets), cette entreprise d’insertion revendique que 60 % d’entre eux ressortent avec un emploi ou un diplôme en vue.

Les marchés publics représentent 40 % de son volume d’affaires. « Pour le reste, nous travaillons pour des entreprises classiques en direct ou en sous-traitance. Qualité de prestation ou prix, nous devons être dans le marché, même en étant souvent un peu plus chers à cause de nos frais d’encadrement. Autrefois, les entreprises classiques nous voyaient comme des ennemis. Avec le temps, cela change, nous sommes perçus comme leur allié. Nous formons du personnel comme elles ne savent pas le faire. Des sociétés comme Norauto, Cyclocity (groupe JCDecaux) ou le groupement d’employeurs du bâtiment recrutent chez nous », explique François Pastre, directeur général.

350 000 euros sur 4 ans

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Pour lui, les appuis vélo représentent un petit marché. 350 000 € sur quatre ans pour 400 exemplaires, fabriqués sur des modèles en partie créés par le bureau d’études d’Atao. Les bons de commande déclenchent la fabrication par petites séries de 15 ou 20. « Nous les glissons dans la ligne de production de nos quinze salariés en métallerie. Nous pourrions en faire deux, trois fois plus. »

Ces marchés réservés, selon François Pastre, pourraient se multiplier. « Ils ne représentent que 0,5 % de la commande publique alors qu’ils ont un impact très important dans la ville. Celui-là, des appuis vélos, même s’il n’est pas très gros, donne du rythme, de la cadence à la production en atelier. Il sert d’abord aux personnes en formation mais après leur apprentissage du métier, ils le transmettent, ce qui leur fait aussi beaucoup de bien. Et finalement, au départ centrée sur l’insertion par le travail, nous devenons de plus ce que nous appelons une entreprise apprenante. »

Les acheteurs publics doivent être moins frileux

François Pastre

Il ose donc encourager les acheteurs publics à se montrer moins « frileux » en la matière. « Les entreprises de l’ESS ont des difficultés d’accès à la commande publique qui ressemblent à celles des artisans. Nous, après 20 ans d’existence, nous avons une expertise, une place, une notoriété. Nous n’hésitons plus à présenter des dossiers aux donneurs d’ordre publics mais pour beaucoup d’autres, les marchés sont, par exemple, surdimensionnés », témoigne-t-il.

« Ou ils se heurtent au poids des habitudes. Moins celles des services achats et des facilitateurs, spécialisés dans les marchés à contenu social, qui voient souvent passer les plus gros d’entre eux, que des acheteurs isolés dans leurs services qui traitent de plus petits contrats souvent attribués aux mêmes fournisseurs, sans contact avec les services achats proprement dits », poursuit François Pastre. Les dernières obligations en la matière apportées par les plus récentes lois, notamment AGEC et Résilience et Climat lui vont donc très bien.

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