Face aux ruptures d’approvisionnement et aux prix élevés de certains médicaments, la Commission européenne travaille à une nouvelle politique pharmaceutique, en cohérence avec ses États membres. C’est dans cette dynamique que la commission des Affaires européennes (CAE) du Sénat a, le jeudi 20 octobre, adopté les propositions formulées par les rapporteures Pascale Gruny et Laurence Harribey. Leur principe tient en une phrase : « créer une forme d’autonomie stratégique européenne par rapport aux états tiers, mais aussi créer une forme d’indépendance par rapport à l’industrie et à ses coûts imposés », résumait le président de la CAE, Jean-François Rapin.
Lister les médicaments critiques
Le Sénat propose notamment de définir une liste de médicaments critiques à l’échelle de l’Union en croisant criticité clinique, selon l’intérêt thérapeutique, et criticité industrielle, en fonction des vulnérabilités des chaînes de production. En « contrepartie à l’autorisation de mise sur le marché (AMM) » selon Laurence Harribey, sénatrice de la Gironde, ces médicaments seraient par ailleurs contraints « d’élaborer des plans de continuité d’activité », soit la constitution de stocks, et « des plans de gestion des pénuries ».
Enfin, outre une simplification de l’AMM, notamment via des notices numériques pour faciliter la circulation des médicaments entre États membres, le Sénat soutient l’instauration « d’un système d’information permettant aux autorités compétentes et aux industries pharmaceutiques de signaler les ruptures potentielles ou effectives ».
Vers une production publique possible
Alors que 40 % des médicaments sont issus de pays tiers et 80 % des fabricants de substances pharmaceutiques sont établis en dehors des frontières européennes, le Sénat consacre par ailleurs une part de ses propositions à l’autonomie sanitaire de l’Europe. Sans avancer de chiffres, la CAE milite pour une « véritable politique industrielle » sur la base d’ « incitations financières et fiscales au maintien ou à la relocalisation de sites de production », quitte même à « organiser une production publique, notamment dans le cadre de partenariat public privé » pour les médicaments indispensables, a exposé Laurence Harribey.
L’obligation d’un prix juste et équitable
Enfin, parce que « la recherche médicale n’a de l’intérêt que si elle profite aux patients » et « que le regard par le prisme économique ne peut plus être l’obligation », souligne Pascale Gruny, sénatrice de l’Aisne, la commission sénatoriale a travaillé sur le prix des médicaments innovants et le développement de ces derniers.
Au menu des mesures avancées, la création d’un fonds de soutien géré par la Commission européenne et les États membres au profit des moins dotés d’entre eux, la définition d’un prix « juste et équitable » basé sur la transparence des coûts de recherche ainsi que sur les impacts du produit, et l’octroi de licences obligatoires lorsque le titulaire de l’AMM refuse de commercialiser à ce montant. Un avis politique résumant ces observations et propositions sera adressé à la Commission européenne, laquelle doit répondre sous trois mois.