Hôpital de la Broye : puiser l’énergie dans le lac

Depuis quelques semaines, à Estavayer-le Lac, la vieille chaudière à fioul de l’hôpital intercantonal de la Broye a été mise au rebut pour être remplacée par deux pompes à chaleur alimentées grâce à l’eau puisée dans le lac de Neuchâtel. Pas moins de 200 000 litres de fioul seront ainsi économisés chaque année, et le rejet annuel de CO2 dans l’atmosphère diminuera quant à lui de plus de 500 tonnes…

Publiées en 2017, les nouvelles normes environnementales du canton de Vaud sont sans appel : les gros consommateurs d’énergie doivent désormais couvrir leurs besoins avec 70 % d’énergie renouvelable. À l’hôpital Intercantonal de la Broye, exit la chaudière fioul qui affiche 43 années au compteur ! Et quand bien même le canton ne se serait-il pas engagé dans une véritable reconversion énergétique, le rendement antédiluvien de la chaudière mise en service en 1978 la vouait à une mort certaine.

Plusieurs solutions s’offrent aux dirigeants de l’hôpital qui commandent alors une étude à un bureau d’ingénierie vaudois de la Broye. Assez rapidement, la solution d’un chauffage à pellets (granulés de bois) semble tenir la corde, mais les contraintes administratives sont d’autant plus importantes que l’hôpital intercantonal est justement… intercantonal, à cheval sur les cantons de Vaud et de Fribourg qui se balkanisent littéralement sur les rives du lac de Neuchâtel.

Savoir dépasser les contraintes

Le siège du HIB est à Payerne, dans le canton de Vaud, alors que le site d’Estavayer est quant à lui rattaché au canton de Fribourg. C’est donc la règlementation vaudoise qui s’applique. Mais c’est de concert avec la commune fribourgeoise d’Estavayer-le-Lac que la décision a été prise d’étudier une autre piste plus écologique afin d’éviter qu’une noria de camions chargés de granulés de bois vienne déranger la quiétude de ses visiteurs et des touristes.

Pour Brian Coley, directeur de la logistique et des systèmes d’information, et Stéphane Scarpino, chef de projet infrastructures et biomédical, la marge de manœuvre de l’hôpital se rétrécit comme peau de chagrin : « D’entente avec la commune, nous cherchions une autre solution au chauffage bois, explique Stéphane Scarpino, et comme les études conduites par le bureau d’ingénierie avaient montré que la structure des sols ne nous permettait pas de recourir à la géothermie, il ne nous restait plus beaucoup d’options ».

Seul hôpital suisse à utiliser la technique

Stéphane Scarpino et Brian Coley

Un véritable casse-tête : « Il nous aura fallu sept années d’études pour sortir ce dossier, explique-t-il, mais la solution que nous avons retenue au final est aussi satisfaisante d’un point de vue environnemental que financier », juge Brian Coley. C’est d’une entreprise fribourgeoise qu’est venu le salut : « Nous sommes à notre connaissance le seul hôpital suisse à utiliser cette solution, déclarent de concert Brian Coley et Stéphane Scarpino, dans nos trois bâtiments d’Estavayer les températures seront maîtrisées hiver comme été, car si dans l’immédiat nous ne nous sommes penchés que sur l’installation de chauffage, les deux pompes à chaleur que nous venons de mettre en service pourront produire du froid lorsqu’il nous faudra remplacer notre installation actuelle ». Puiser l’eau du lac, la commune d’Estavayer était cette fois-ci réceptive, d’autant qu’un réseau existant de conduites souterraines pouvait être utilisé.

D’une puissance de 850 kW, les deux pompes à chaleur sont alimentées par de l’eau puisée à 38 mètres de profondeur grâce à 300 mètres de conduites. L’eau utilisée pour le chauffage est ensuite rejetée à proximité immédiate du port, ce qui permet de créer un courant qui vient oxygéner les eaux stagnantes.

Concilier écologie et économies

Les études préliminaires qui ont été conduites par l’entreprise fribourgeoise à l’origine du projet ont montré que la température de l’eau rejetée n’aurait que 2 à 3°C de plus que l’eau pompée dans le lac. Autant dire qu’au regard de sa capacité de 14 000 000 000 m3, l’incidence est nulle.

Une autre incidence est nulle également : celle de l’immobilisation financière et du budget de fonctionnement. « Nous avons choisi de faire du contracting, explique Brian Coley, le groupe fribourgeois qui a été retenu a assumé l’intégralité des investissements et c’est lui qui assurera la maintenance, nous n’achetons que des kWh ! ».

Bien sûr, l’hôpital intercantonal de la Broye est marié pour 20 ans avec son fournisseur d’énergie, « mais les différentes études qui ont été conduites ont montré que le coût du kWh sera neutre pour nous, concluent Brian Coley et Stéphane Scarpino, nous savons exactement quel sera le montant de notre facture énergétique pour les vingt ans à venir ». Premier bilan dans un an. En attendant, le gain en maintenance devrait se chiffrer chaque année à près de 100 000 CHF, soit environ 91 000 euros.

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