20 filières de tri au CHU d’Amiens

Restes alimentaires, papier, verre, métaux des blocs opératoires, le CHU d’Amiens cherche à collecter et à revaloriser le maximum de ses déchets dans le cadre d’une démarche globale RSE. Dernière initiative en date : la récupération des masques usagés. L’établissement picard compte bien élargir le cycle vertueux au linge usé, au verre médicamenteux et au plastique en chirurgie.

© JMB

Depuis quelques semaines, des collecteurs ont fait leur apparition au CHU d’Amiens afin de récupérer masques chirurgicaux et FFP2. On les retrouve à proximité des vestiaires pour les professionnels, des services de soin et des entrées et sorties des trois sites de l’établissement picard. Soit 120 points stratégiques.

Car, même si l’hôpital picard est loin des pics de consommation des premières vagues Covid, près de 10 000 masques continuent d’être utilisés chaque jour dans ses locaux. Le CHU a donc passé un marché pour trouver un fournisseur, implanté dans les Hauts-de-France, dont la solution innovante permet d’extraire le plastique polypropylène des masques, de broyer la matière et de la rendre de nouveau utilisable au profit de l’industrie automobile et aéronautique.

Une démarche globale RSE

Conçus avec l’aide de l’unité d’hygiène, les collecteurs, fabriqués en carton recyclé, peuvent récupérer entre 500 et 750 unités. Centralisés par la logistique de l’hôpital, les masques, auparavant jetés à la poubelle, sont ensuite récupérés par l’industriel. « Il s’agit certes d’un coût supplémentaire pour le CHU, mais ce qui prime, c’est d’agir pour l’environnement. L’établissement a donc consenti un effort financier », explique Houda Beaugé, directrice des approvisionnements et des services logistiques.

Loin d’être isolée, l’opération s’inscrit dans une « démarche globale RSE », insiste-t-elle. La problématique est suivie de très près par un comité de pilotage dédié, que préside Gérard Stark, DGA de l’établissement picard. Sujet majeur, les déchets ont leur propre comité de pilotage. Composé de manière pluridisciplinaire, avec des représentants des équipes médicales, des directions des soins, de la qualité, de l’hygiène, de la logistique, et des achats, il se réunit au moins trois fois par an. De quoi provoquer « une émulation intellectuelle autour de tout ce qui peut être entrepris pour rationaliser la gestion de nos déchets et les diminuer », enchaîne la directrice.

147 tonnes de biodéchets recyclées

Même si la crise sanitaire a obligé à mettre certaines actions entre parenthèses, le CHU amiénois travaille sur tous les fronts. Pour preuve, vingtaine de filières de tri fonctionnent. L’un des objectifs majeurs a évidemment été de réduire les DASRI (500 tonnes). « Nous figurions parmi les établissements avec un ratio DAOM/DASRI parmi les plus faibles (14 %). Malheureusement, le Covid a eu un impact en raison des recommandations nationales, ce qui a provoqué une augmentation exponentielle de nos DASRI en 2020 et une partie de l’année 2021, alors même qu’on était sur une courbe décroissante forte depuis 2016 au moins. On a donc impulsé un certain nombre d’actions pour revenir à la décroissance », poursuit Houda Beaugé.

L’année dernière, le CHU est parvenu à recycler 147 tonnes de biodéchets. Programmé en 2022, le nouveau self, avec ses collecteurs, devrait permettre d’améliorer le score. Par ailleurs, plusieurs leviers ont été utilisés pour limiter le gaspillage. Le repas du soir est passé de 5 à 4 composants. Et la fourniture de pain tranché et servi à la demande est testée. « Il ne s’agit pas d’essayer de faire des économies. L’idée, c’est que chacun se responsabilise et mange en fonction de son appétit. Les sommes récupérées sont réinjectées pour nous permettre de nous inscrire dans une démarche d’amélioration continue de nos prestations », commente la directrice des approvisionnements et des services logistiques.

Du papier des secrétariats aux métaux des blocs opératoires

S’agissant du papier, des bannettes ont été distribuées dans les secrétariats et les services administratifs et installées également près des copieurs. Le verre alimentaire n’a pas été oublié. Les volumes demeurent symboliques et concernent essentiellement les bouteilles ou petits pots. « Mais cela était important par rapport à notre politique ambitieuse en matière de développement durable. Et il était difficilement compréhensible de jeter le verre dans les ordures ménagères au CHU alors qu’on le recycle à la maison », remarque Houda Beaugé.

Depuis la fin du mois d’octobre, l’aluminium des bouteilles de gaz halogéné, la ferraille et le cuivre des instruments sont systématiquement triés au bloc opératoire puis décontaminés. Récupérés, les métaux sont ensuite valorisés par un prestataire. Dans la même logique, le CHU a acquis trois stations mobiles de traitement in situ des déchets liquides afin de les évacuer avec les eaux usées. Et a fait d’une pierre deux coups, en éliminant des DASRI (28 tonnes de moins en un an) et des TMS. « Ces déchets étaient stockés dans d’énormes fûts de 25 kg qui nécessitaient d’être manipulés », précise le docteur Jérémie Garnier, anesthésiste-réanimateur.

« Cela n’augmente pas beaucoup la charge de travail et le circuit est assez simple. Nos infirmiers sont très impliqués et très motivés. Ils trient à la maison et ne comprennent pas que l’on ne le fasse pas à l’hôpital », poursuit le docteur Garnier, initiateur d’une démarche développement durable auprès des équipes chirurgicales il y a trois ans, avec son confrère Loïc Del Bove, auteur d’une thèse sur les conséquences environnementales de l’activité des blocs. Leur exemple devrait faire des émules. Le service d’orthopédie veut mettre en place une filière de récupération d’objets métalliques.

Au tour du linge usé, du verre médicamenteux et du plastique des blocs

Autant d’initiatives largement relayées en interne, notamment via l’intranet du CHU.  Les résultats sont présentés de façon parlante. « De janvier à juillet 2021, le CHU a contribué à la production électrique issue de la méthanisation des biodéchets, équivalente à la consommation annuelle de 1030 foyers, à sauvegarder le volume d’eau d’environ 4 piscines olympiques et à éviter la découpe de 3860 arbres », illustre Imad Fakhri, ingénieur en charge de la logistique.

Le CHU d’Amiens ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Une réflexion est lancée au sujet du verre médicamenteux, une autre sur le plastique des blocs. « 80 % des déchets sont des emballages en plastique ouverts avant même d’avoir pratiqué l’intervention et qui n’ont pas de risque infectieux », résume le docteur Garnier. Actuellement jeté dans les déchets ménagers, le linge usé est également dans les tuyaux. « Demain il sera recyclé, promet Imad Fakhri, mais il nous faut au préalable lancer un marché en bonne et due forme ».

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